Réflexions sur l'ennéagramme

L’ennéatype 5 dans tous ses états (partie I)

L’ennéagramme, malgré sa présentation simple, et un modèle extrêmement complexe à aborder. (Bien plus que le MBTI, à mon sens.) Des années de travail, d’observation et d’échanges sont souvent nécessaires pour le maîtriser correctement. Quand je relis mes articles sur le sujet, je les trouve imprécis et relativement clichés. Finalement, il n’y a que la base 5 (parce que je la vis en plus de l’observer) que je pense pouvoir expliquer de manière vraiment juste et complète. Cela tombe à pic puisque apparemment, le monde de la psychométrie amatrice francophone en a besoin. C’est parti !

On fait n’importe quoi avec l’ennéatype 5

Bon, on fait n’importe quoi avec l’ennéagramme d’une façon générale, entendons-nous bien… Toutefois, j’ai la sensation que l’ennéatype 5 est particulièrement victime de la confusion entre comportement et motivation au sein de la communauté MBTI/ennéagramme. Une grande partie des personnes se déclarant en base 5 (et croyez-moi j’en ai croisé un sacré paquet) s’identifient à ce profil pour de mauvaises raisons. Leur croyance se fonde sur une compréhension floue de cet ennéatype doublée d’effet Barnum.

Voici donc un récapitulatif des points qui ne définissent PAS l’ennéatype 5, mais qui servent quand même massivement d’arguments pour se typer 5 :

– Être introverti, c’est-à-dire perdre de l’énergie au contact du monde extérieur (interactions sociales, stimuli de l’environnement…) et regagner de l’énergie au contact de son monde intérieur (activités solitaires, temps passé au calme…), ce qui implique souvent un cercle social restreint et une tendance à rester cloitré chez soi le week-end. Environ 50 % de la population est introvertie. Jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas 50 % d’ennéatypes 5 au sein du genre humain. En plus, il y a des 5 extravertis, mêmes s’ils sont minoritaires.

– Adorer apprendre, voire mettre le savoir au centre de sa vie. Le 5 fait effectivement cela, mais pour des raisons bien spécifiques. Tous les autres ennéatypes peuvent accorder une place primordiale à la connaissance dans leur vie, pour d’autres raisons liées à leur propre mécanisme. Je suis au regret de vous informer que tous les professeurs et chercheurs de la planète ne sont pas en base 5. (Et heureusement pour nous.)

– Être analytique, passer son temps à observer le monde pour essayer de le comprendre. Pour rappel, il n’y a pas un mais trois ennéatypes avec un centre mental dominant, et le 5 n’est pas le seul à posséder un cerveau fonctionnel. Plus largement, chaque ennéatype peut être fortement analytique à sa façon et pour servir ses intérêts.

– Être timide, phobique social ou plus ou moins autiste. Tous ces traits renvoient à des conditions ou pathologies qui peuvent se retrouver dans toutes les bases. (Je sais, je me répète… c’est pour toutes les fois où des gens ont oublié d’y penser.)

– Avoir un « vide intérieur ». Alors là, les amis… c’est la foire à la saucisse. Open bar, tout y passe, on se croirait dans un meeting d’extrême gauche. Le vide intérieur du 5, tout le monde témoigne en être victime mais personne n’a l’air de savoir ce que c’est exactement. Ça tombe bien, je vais vous l’expliquer plus loin dans l’article. (Spoiler : c’est un peu plus spécifique que la vague mélancolie de vivre dans une société matérialiste, consumériste et superficielle, qui nous assure qu’on sera enfin heureux en achetant toujours plus de merdes fabriquées dans le tiers-monde pour nous donner une illusion de contrôle sur notre existence dénuée de sens. Et ça n’a rien à voir avec votre dernière rupture non plus.)

Du coup, si vous vous pensiez en base 5 en vous reposant sur ces critères, je vous informe que votre opinion ne se fonde sur absolument rien de crédible. Il va falloir recommencer tout votre travail de recherche et d’introspection, et arrêter d’aller dire à vos copains du groupe Facebook secret « INTJ Master Race » que vous êtes en base 5 car vous lisez des articles sur l’immunologie pendant vos pauses midi au lieu de regarder le foot en vous mettant les doigts dans le nez. Voilà. (Et avec des méthodes d’analyse aussi bancales il est fort probable que vous ne soyez pas INTJ non plus, mais une chose à la fois…)

Mais du coup c’est quoi, l’ennéatype 5 ?

C’est bien de se poser la question à un moment donné quand on cherche sa base ennéagramme, j’avoue. Je vais tenter ci-après de dégager l’essence de la base 5, les concepts qui font la moelle de son mécanisme égotique.

Le vide intérieur : de quoi parle-t-on ?

Il y a dans la pensée du 5 une omniprésence du champ lexical de la gestion de ressources. Donner ou ne pas donner. Révéler ou dissimuler. Economie ou gaspillage. S’investir ou rester en retrait. Se dépenser ou se reposer. Vide ou rempli. Assez ou pas assez. Se sentir aspiré, englouti, ou se sentir enrichi, renforcé. Etc. La nature des ressources varie selon l’individu (les connaissances, les compétences, les émotions, la force vitale…), mais le mouvement de l’énergie reste le même. Chez tous les 5, on retrouve la peur constante d’être dépouillé de ses ressources intérieures et ainsi démuni face au monde extérieur… un monde dont les exigences sont supérieures à la quantité de ressources que le 5 se sent capable de fournir. La rétention est donc nécessaire à la survie. C’est le fondement de sa compulsion : éviter le vide intérieur.

Le 5 remplace les moments où il pourrait s’offrir aux autres (en étant présent physiquement et/ou psychologiquement) par des moments où il continue de se remplir seul de son côté, sous prétexte qu’il ne contient pas encore assez de ressources pour faire face aux situations de la vie. (Par exemple : décliner les invitations à des événements sociaux car il préfère rester chez lui à lire des manuels de chimie.) Il croit qu’à force de se remplir, il finira par se sentir suffisamment bien préparé et pourra enfin apparaître au-dehors et agir. En réalité, le 5 ne se sent jamais suffisamment rempli… pour la simple raison que la seule chose pouvant combler réellement son vide intérieur se trouve dans le monde extérieur. Dans sa fixation de détachement, le 5 incarne ainsi l’avarice dans l’ennéagrame traditionnel, en accumulant pour lui-même sans faire profiter autrui de sa grande richesse. Il détient tous les savoirs possibles, sauf peut-être le plus important : la joie d’être en connexion avec ses pairs humains.

Voici une situation typique du quotidien d’une personne en base 5 :

« Tu viens danser avec nous, le 5 ?
– Non, je ne sais pas danser. (Je suis vide. Je ne peux pas donner de moi.)
– Ah mais ça fait rien, ça, on va t’apprendre ! Et puis on est là pour s’amuser.
– Je préfère vous regarder faire d’abord, pour comprendre comment ça marche. (Je me détache plutôt que de m’impliquer.)
– Tu apprendras bien mieux en essayant de danser avec nous !
– Ah non, ça me stresse, je ne maîtrise vraiment pas la danse, vous savez… (Je veux éviter le sentiment de vide lorsque je suis confronté à une situation que je ne maîtrise pas. Je vais plutôt acquérir les ressources de mon côté, ensuite seulement je me sentirai assez fort pour venir parmi vous et gérer la situation.) ».

Le 5 contemple le monde extérieur à travers une vitre symbolique. Lui-même tend à se regarder à la troisième personne, comme s’il était son propre sujet d’expérience…

Vous notez qu’à aucun moment dans cet exemple, le 5 n’a considéré qu’il pouvait obtenir les ressources manquantes autrement que par ses propres moyens. Ni qu’il pouvait dépenser de l’énergie sans raison apparente, juste pour s’amuser ou se défouler. Pourquoi nourrit-il donc cette croyance inconsciente que l’extérieur ne fait que prendre, jamais donner ? Il n’a pas identifié de figures nourricières étant enfant, ou bien celles-ci ne respectaient pas son espace vital et l’ont forcé au repli : l’idée d’en chercher ailleurs ne lui traverse simplement pas l’esprit. Pour s’épanouir, le 5 doit dépasser sa peur d’être débordé par les demandes et de se retrouver sans ressources. La tâche est difficile, car le vide intérieur provoque chez lui de fortes angoisses : c’est le travail d’une vie. Toutefois si le 5 y parvient, il découvre que l’environnement n’est pas qu’un gouffre aspirant son énergie, mais aussi un lieu généreux en ressources. Il accède alors à sa vertu, le désintéressement.

En temps normal, le 5 communique comme s’il se trouvait face à une interface de contrôle. Devant lui se trouvent des contenants, correspondant à chaque aspect de son existence : ses connaissances, ses émotions, des informations personnelles, les différents milieux qu’il fréquente… (Le 5 divise pour mieux régner. Ainsi, si un compartiment de sa vie est touché, les autres sont épargnés et peuvent rester fonctionnels.) En gardant un œil alerte sur l’état de chaque compartiment, il calcule ce qu’il va donner, ouvre et ferme méticuleusement les vannes pour laisser sortir les ressources choisies. Voilà ce qui donne le « traité », son style de communication signature : les fameux exposés un peu assommants, derrière lesquels il se cache pour éviter de s’impliquer de manière plus personnelle. Gare à qui oserait lui en réclamer plus ! Le 5 est le seul maître à bord, et fuit aussitôt qu’on fait mine d’aller trifouiller dans sa machinerie. En entrant en contact avec sa vertu, le 5 oublie un moment sa gymnastique mentale, ouvre son cœur et partage avec bienveillance ses connaissances et sa sagesse aux autres. Il aide spontanément ses congénères sans attendre de louanges.

Je viens de décrire la problématique centrale du 5. Elle concerne tous les individus en base 5, quel que soit leur type MBTI ou autres différences individuelles. Une personne qui n’a pas ce mécanisme au coeur de son existence n’est pas en base 5, peu importe combien elle est érudite et analytique par ailleurs. Dans la mesure où tout ce qui va suivre tourne autour du vide intérieur et sa dynamique spécifique, s’il n’est pas présent, rien ne peut tenir debout. Ceci dit, je vais maintenant détailler les nombreuses façons dont le mécanisme du 5 peut s’exprimer, en fonction des variantes instinctuelles, du sous-type et des ailes.

Les variantes instinctuelles du 5

Nous possédons tous trois instincts : l’instinct de conservation (qui se préoccupe de notre intégrité physique), l’instinct social (qui se préoccupe de notre intégration au groupe de pairs) et l’instinct sexuel (qui se préoccupe de nos relations intimes – y compris au-delà du cadre strictement sexuel). Ces instincts sont hiérarchisés selon l’importance qu’y accorde l’individu. L’instinct dominant constitue une préoccupation majeure et peut être source d’angoisse et d’excès. L’instinct de soutien est important, mais l’individu n’y porte pas un intérêt obsessionnel : le rapport à cet instinct est donc généralement équilibré. L’instinct réprimé tend à être délaissé par l’individu : il ne pense pas souvent à le satisfaire, mais n’y voit pas de problème… Chez l’ennéatype 5, l’instinct dominant détermine dans quel domaine la compulsion d’évitement du vide intérieur va se spécialiser.

  • Le 5 de variante Conservation (Sp – pour « self-preservation »)

Chez le 5 Sp, la compulsion se manifeste surtout par une peur d’être vidé de son énergie vitale. Il a une peur viscérale d’être affamé, de manquer de sommeil, de gaspiller l’argent, de ne pas avoir assez de temps pour se reposer avant d’être de nouveau sollicité… Il cherche aussi à garder le contrôle sur son territoire : il craint particulièrement d’être cambriolé, qu’on touche à ses affaires, etc. Il est très difficile se faire sortir ce 5 de chez lui, dans la mesure où il réclamera des heures de récupération après chaque événement. Sa maison est un véritable sanctuaire où seuls quelques rares élus sont autorisés à entrer. Il accumule des ressources dans sa tanière (vivres, documentation, objets liés à sa spécialisation…), comme s’il se préparait à tenir un siège. On surnomme d’ailleurs ce 5 le « Château-fort ». Cette variante est la plus susceptible d’adopter un mode de vie ermite, préférant se retirer de la civilisation pour aller cultiver des radis dans une bicoque reculée que supporter la teuf hebdomadaire de son voisin du dessus.

Quand l’instinct de conservation est réprimé, le 5 ne cherche pas à avoir un sanctuaire dans lequel se réfugier, ni spécialement à développer des compétences de survie. Son avarice se traduit peu sur le plan physique : la rétention portera plus sur les connaissances et/ou les émotions.

  • Le 5 de variante Sociale (So)

Les 5 ont tendance à exister socialement en tant que connaisseurs. Lorsqu’ils doivent communiquer, il est bien plus facile pour eux de livrer une information « neutre » que des éléments plus personnels ou leurs émotions. Chez le 5 So, cette dimension est particulièrement présente : ce 5 a un fort besoin de se montrer et d’être reconnu comme « Celui qui sait ». On l’appelle le « Totem ». Il essaye d’incarner une icône de la connaissance dans son domaine de prédilection. Pour rester en accord avec son mécanisme, il sélectionne un milieu où il va pouvoir jouer son rôle social à fond, en utilisant son dialecte spécialisé rassurant. Par exemple, un cercle d’universitaires ou un club de passionnés. Le risque est alors qu’il devienne discriminant vis-à-vis des profanes, jugés indignes de recevoir sa richesse intérieure. Il peut aussi se retrouver piégé dans l’image du savant et finir par devenir l’ombre de lui-même à force de répéter toujours les mêmes exposés. Ce 5 est le plus susceptible de devenir élitiste ou pédant.

Quand l’instinct social est réprimé, le 5 ne se préoccupe pas ou peu de sa place au sein d’une communauté. Il ne cherche pas beaucoup à partager son travail au-delà de son cercle intime, et son côté « hibou savant » peut être inconnu en-dehors de celui-ci.

  • Le 5 de variante Sexuelle (Sx)

Si le 5 est un être secret, le 5 Sx en joue plus que tous les autres. Surnommé « Confidence-confiance », il parvient à concilier sa compulsion avec son besoin important de nourrir des contacts humains intenses. Pour ce faire, il utilise le retrait comme un moyen de s’entourer d’une aura séduisante : agir avec mystère la majorité du temps ne fait qu’accroître le panache des informations révélées ! Lorsqu’il est en situation de tête-à-tête, ce 5 fait comprendre à son interlocuteur qu’il est un privilégié : « Tu sais, je ne raconte ça à personne d’habitude, c’est la première fois que je me confie de la sorte. Il doit y avoir quelque chose de spécial entre nous, pour que je sorte de ma cachette ». Le 5 Sx est moins consensuel et prude que les autres. Il craint moins d’assumer son côté atypique, peut être assez provocateur et ouvertement jaloux.

Quand l’instinct sexuel est réprimé, cela donne un 5 qui semble un peu apathique et coincé. Il est embarrassé dans les situations de tête-à-tête, ne se sent pas concerné par les rivalités et ne cherche pas beaucoup à mettre sa personne en valeur.

Je vais clore ici la première partie de ce dossier. Pour consulter la seconde partie, qui porte sur les flèches d’intégration et désintégration, les ailes et les idées reçues sur l’ennéatype 5, cliquez ici.

Analyses de personnages

Analyse de Nanachi (INTP 5)

Nanachi est l’un des protagonistes de Made in Abyss. Bien qu’apparaissant assez tardivement dans l’œuvre (aux 2/3 de la première saison de l’anime et dans le volume 3 du manga), le personnage est très loin d’être au second plan de l’intrigue. De nombreux fans de Made in Abyss considèrent d’ailleurs que l’arrivée de Nanachi a été décisive dans leur appréciation de la série : sa finesse d’écriture y est de toute évidence pour beaucoup (ainsi que son chara design craquant, OUI, il faut l’avouer.). Il s’agit pour ma part de l’un de mes personnages fictifs préférés. Si vous aimez l’aventure, la fantasy et l’horreur, je vous recommande fortement de lire ou visionner Made in Abyss avant de lire ce billet spoilant généreusement la saison 1 (soit les 3 premiers tomes du manga ou les 2 premiers films récapitulatifs), pour la grande qualité de sa narration et de ses dessins.

Attention : malgré son design enfantin, il est bon de préciser que Made in Abyss s’adresse à un public averti. Le manga est classé seinen et son adaptation animée interdite aux moins de 12 ans (15 ans dans certains pays), en raison de certaines scènes très violentes.

Note : dans la version originale de l’œuvre, le genre de Nanachi n’a jamais été spécifié. Le personnage emploie le pronom désuet « Oira » pour se désigner, qui a une connotation plutôt masculine, mais des éléments de sa biographie ainsi que sa voix dans l’anime font plutôt penser à un genre féminin. Lorsque la question fut posée à l’auteur, celui-ci a répondu « Imaginez-le ! ». S’il existe des pronoms il/elle en japonais, ceux-ci sont peu employés, car l’on préfère désigner les gens par leur nom. Il est donc assez aisé d’entretenir une ambiguïté sur le genre d’un personnage. Dans la version anglophone, le pronom neutre « them » est utilisé pour se référer à Nanachi. Or dans les langues ne disposant pas de pronom neutre officiel, Nanachi est généralement désignée au féminin. J’utiliserai donc le pronom « elle » dans cet article. (Entre nous : je pense que Nanachi s’en fout.)

Fonction dominante : Pensée introvertie (Ti)

Nanachi est avant tout une personne cérébrale. Enfant, elle dévorait de nombreux livres qu’elle récupérait dans les poubelles, quitte à se faire rejeter par ses camarades pour ses intérêts décalés. Elle a appris seule l’abyssien, une langue ancienne, pour pouvoir déchiffrer plus d’ouvrages sur l’Abysse. Au fil du temps, elle a acquis de façon autodidacte une très vaste connaissance de ce lieu. Elle connaît par cœur ses écosystèmes, les poisons et leurs remèdes, les techniques de traque et de survie… Elle a même compris par elle-même comment la malédiction agissait sur les explorateurs et trouvé un moyen de l’éviter. Ceci laisse penser qu’elle passe beaucoup de temps à analyser le fonctionnement du monde et présente des facilités pour classifier les informations.

Nanachi n’est pas très à l’aise pour communiquer : de toute évidence, elle intègre les connaissances selon sa propre logique et ne sait pas forcément comment les rendre accessibles aux autres. C’est pourquoi, lorsqu’elle souhaite transmettre son savoir, elle privilégie l’utilisation de métaphores, de dessins ou d’expériences, inspirés notamment par sa fonction auxiliaire Ne.

Nanachi affiche la plupart du temps un visage impassible et s’exprime sur un ton monocorde, comme rien ne pouvait vraiment l’atteindre. Elle n’apprécie pas qu’on la touche (ni même qu’on observe sa douce fourrure avec envie) et met beaucoup de temps avant de s’ouvrir émotionnellement. Malgré son jeune âge, elle sait rester parfaitement calme et réfléchie dans les situations critiques. Dans l’épisode 10, lorsqu’elle découvre Reg en crise de panique devant le corps inconscient de Riko, elle analyse sans problème la situation puis lui explique ce qu’il doit faire, étape par étape. Elle détermine facilement la manière logique dont vont s’enchaîner les événements et adapte son comportement en fonction, sans céder à ses affects. Pour cette raison, elle devient rapidement un pilier pour le groupe.

Fonction auxiliaire : Intuition extravertie (Ne)

Nanachi a toujours eu une certaine ouverture d’esprit et un goût naturel pour l’exploration. Enfant, elle rêvait, plus que tous les autres enfants de Sérénie, de partir en quête des mystères de l’Abysse. Bien qu’elle n’ait jamais eu d’objectif particulier lié à l’Abysse (contrairement à Mitty, qui souhaitait devenir un sifflet blanc), le simple fait de plonger dans l’inconnu était une motivation suffisante pour suivre Bondrewd. Sa nature cartésienne ne l’empêche pas de s’intéresser aux croyances ésotériques autour de l’Abysse, et de prier Dieu dans ses moments les plus difficiles. « Dieu, si vous êtes au fond de cette Terre, faites que j’y aille aussi », murmure-t-elle en s’endormant près d’un livre sur l’Abysse dans son orphelinat… Elle semble aussi aimer les contes remplis de symbolique, comme ceux qu’elle lit à Mitty dans sa tanière du 4e niveau. Elle communique souvent de façon inventive, en utilisant des métaphores (par exemple, lorsqu’elle explique le fonctionnement de la malédiction de l’Abysse à Reg à l’aide d’un voile translucide) ou en réalisant des expériences audacieuses.

Nanachi n’hésite pas à réaliser des expériences un peu douteuses pour expliquer les phénomènes abyssaux

Perspicace, Nanachi perçoit facilement les messages cachés, ce qui lui permet de deviner les intentions des autres personnages. Dans l’épisode 11, elle comprend que Riko a demandé qu’on lui sectionne la main plutôt que l’avant-bras pour stopper le poison (alors que la seconde opération est plus facile et moins douloureuse), car elle comptait se relever de cette épreuve et continuer son aventure. Elle la qualifie de « remarquable » dans sa détermination. Elle valorise l’esprit aventurier et le fait de ne jamais abandonner ses rêves. Nanachi est aussi capable de « voir » le champ de force de l’Abysse ou de sentir que l’âme de Mitty est encore prisonnière de son corps maudit, sans pouvoir l’expliquer rationnellement.

Fonction tertiaire : Sensation introvertie (Si)

En raison de sa condition très pauvre, Nanachi a acquis très tôt l’habitude de ramasser tout ce qu’elle trouvait. Dans le flash-back l’épisode 13, elle avoue à Mitty que si ses camarades des rues chantent ou volent pour gagner de l’argent, elle, « elle ne sait que ramasser des choses ». C’est d’ailleurs en trouvant des livres dans les poubelles qu’elle est devenue si cultivée. Dans sa cabane au 4e niveau de l’Abysse, on peut voir s’entasser du matériel d’exploration et autres babioles récupérées deçà-delà sur son territoire (pioches, cordes, sifflets de caverniers…). Elle semble aimer accumuler des petits trésors en vrac, sans usage particulier. On découvre que Nanachi enterre les caverniers décédés chez elle dans un lieu calme et isolé, en prenant soin d’ajouter une pierre tombale : en sachant qu’elle pourrait tout aussi bien pousser leur dépouille dans le vide, on peut supposer qu’elle respecte à minima certaines traditions.

Nanachi dispose d’une certaine dextérité. Bien qu’elle déclare que « recoudre une plaie n’est pas son fort », elle est capable de réaliser des gestes chirurgicaux simples, ainsi que des dessins d’assez bonne qualité. Elle choque cependant régulièrement Reg par son manque de raffinement. Son approche du corps est très crue et fonctionnelle : elle déshabille Riko inconsciente sans aucune pudeur pour lui enfoncer un suppositoire ou nettoyer ses saignements génitaux. Elle opère également la blessure de la jeune fille en décrivant avec précision les étapes du processus, sous le regard écœuré de Reg. Nanachi est également une cuisinière médiocre, se contentant chaque fois de mélanger tous les ingrédients dans une grande marmite, sans tri ni dosage. (Reg pense, au sujet du ragoût de Nanachi, que « si Riko mange ça à son réveil, ça va l’achever ».)

Fonction inférieure : Sentiment extraverti (Fe)

Nanachi est à la fois très individualiste et pleine d’empathie. Elle blesse souvent les sentiments d’autrui par son attitude détachée et taquine. Exemple notable : dans l’épisode 11, elle fournit à Reg une liste complexe d’ingrédients afin de concocter un remède pour Riko, prétextant que cette dernière mourra s’il met plus de 12 heures à revenir. En réalité, seul un ingrédient de la liste était nécessaire pour sauver Riko, le reste servant juste au dîner. En voyant Reg choqué d’avoir été ainsi baladé alors que la vie de sa meilleure amie est en jeu, Nanachi se contente de trouver une excuse bidon, avant de souffler en aparté « c’est trop facile ». En réalité, Nanachi a surtout des difficultés à exprimer son attachement aux autres et se couvre derrière de l’humour ou des petits mensonges. A la fin de la saison 1, elle déclare au duo de héros qu’elle accepte de les rejoindre « uniquement parce que Mitty aimait bien Riko », alors que sa posture indique qu’elle meurt d’envie de venir avec eux.

Nanachi évite d’intervenir auprès des carverniers en détresse si cela ne l’aide pas à accomplir ses objectifs personnels. Toutefois, elle semble réellement se soucier de leur souffrance lorsqu’elle en recueille un dans sa tanière. Dans le flash-back de l’épisode 13, elle annonce à un blessé qu’elle ne peut soigner « Pardon d’avoir fait durer, je vais te soulager… » et l’achève d’une traite. Elle explique à Reg qu’elle ne comptait pas se montrer à lui et Riko, mais a eu finalement pitié de ses cris de désespoir (tout en se moquant de l’air minable qu’il avait à ce moment). Nanachi voue une loyauté sans failles à Mitty, sa première véritable amie, qu’elle surnomme « son trésor ». Elle déploie toute son énergie à trouver un moyen d’accomplir la dernière volonté de la narehate, à savoir, la tuer pour libérer son âme. Et ce, bien qu’il s’agisse d’une décision extrêmement dure pour Nanachi (et peut-être l’une des seules pensées provoquant des effusions émotionnelles chez elle).

Nanachi est dévastée en voyant que ses tentatives de tuer Mitty (devenue quasi-immortelle après sa transformation) lui infligent seulement une terrible souffrance

Nanachi sur l’ennéagramme

Nanachi est un superbe spécimen d’ennéatype 5. D’après moi, l’un des 5 fictifs les plus pertinents qu’un amateur de culture geek/otaku puisse croiser. Nanachi semble représenter la variante instinctuelle « conservation » de la base 5.

La base 5 de Nanachi se repère très rapidement lorsque le personnage apparaît dans la série, de par son style de communication : quand Nanachi ouvre la bouche, c’est la grande majorité du temps pour partager des informations à son interlocuteur. Elle sort de sa cachette dans l’épisode 10 pour expliquer à Reg comment stabiliser l’état de Riko. Par la suite, elle aura un rôle de mentor, en faisant découvrir à Reg puis à Riko les rudiments de la survie dans les niveaux profonds de l’Abysse. Sans l’intervention de Nanachi, le duo de héros n’aurait tout simplement jamais pu poursuivre sa quête. Dans le flash-back de l’épisode 13, elle se démarque de ses camarades par le fait qu’elle préfère apprendre – sur des sujets très abcons pour une personne de sa classe sociale – que s’amuser ou faire en sorte de manger de meilleurs repas. Mitty, émerveillée par le bagage intellectuel de Nanachi, lui demande de lui enseigner l’abyssien pour qu’elles puissent lire ensemble un ouvrage ancien. Nanachi s’exécute, étonnée (car elle a toujours cru que ses passions n’intéressaient personne) mais ravie de pouvoir enfin partager son savoir.

L’attitude d’ascète de Nanachi n’est pas due qu’à ses origines, puisqu’elle continue de cuisiner n’importe comment une fois dans l’Abysse malgré l’abondance de ressources à sa portée. (Et ce, alors qu’elle a eu le temps de se spécialiser dans tous les autres champs possibles à côté…) Elle avoue à Reg n’avoir jamais mangé de bonne nourriture dans sa vie et être ainsi incapable de juger la qualité du repas qu’elle lui sert. En goûtant la cuisine de Riko, elle semble découvrir le concept de plaisir gustatif, voire de plaisir tout court. Cet aspect du personnage illustre parfaitement le problème des 5 (en particulier ceux qui répriment le centre instinctif) avec l’absence des énergies du 7 et du 8 en eux, les empêchant de se laisser aller à des sentiments de joie spontanée ou de se connecter à leur corps. En n’étant plus que des esprits, ils évitent de se créer des besoins supplémentaires et rassurent leur ego, tandis qu’ils se persuadent inconsciemment de l’inutilité de tels plaisirs pour ne jamais ressentir de manque. Dans son état le plus naturel, Nanachi est une tête flottante à 1m50 du sol – avec une paire d’oreilles de lapin.

Nanachi dégustant pour la première fois autre chose qu’un mélange hasardeux de tripes de poissons et de plantes vaguement comestibles…

Bien qu’elle agisse souvent en professeur, Nanachi tient à garder le contrôle sur le flux d’information. Elle évite de répondre aux questions que lui pose frontalement Reg, en détournant le sujet ou en prétextant qu’elle a aussi « ses petits secrets ». Par exemple, la première fois que Reg lui demande son prénom, elle répond « Je suis une peluche tout douce venue vous consoler » et la seconde fois « Je veux bien te le dire… mais tu ne préfères pas qu’on s’occupe de ton amie, d’abord ? ». De même, quand elle annonce à Reg qu’elle va lui enseigner le fonctionnement de la malédiction, elle semble résignée, comme si elle avait dû faire un effort pour accepter de lui révéler ces mécanismes. Elle prend finalement un plaisir manifeste à lui exposer ses observations, puis à lui proposer des expériences pour saisir encore mieux le sujet.

Au début de l’épisode 11, la fin de l’épisode 10 est rejouée avec le point de vue de Nanachi. On voit qu’elle a observé toute l’attaque du Perce-Balle sans sortir de sa cachette, le souci de ne pas révéler sa présence étant plus important que celui de secourir deux enfants en danger de mort. Elle finit toutefois par intervenir et faire tout son possible pour soigner Riko, car elle s’identifie aux pleurs de Reg et ne souhaite plus voir la souffrance qu’elle a vécu avec Mitty se reproduire. En somme, le jeu entre l’avarice et le désintéressement rythme les interactions de Nanachi avec les autres. Tantôt détachée à un point presque cruel, tantôt profondément humaniste, elle s’épanouit le plus en offrant au monde le fruit de ce paradoxe intérieur.

Nanachi déteste qu’on s’approche trop près d’elle et le fait bien savoir à Reg… L’espace vital, c’est sacré !

Dans l’épisode 13, en découvrant le passé des deux narehate, on comprend que Nanachi a développé une connaissance aussi poussée des poisons et antidotes parce qu’elle passe son temps à essayer de trouver un moyen de tuer Mitty. Elle illustre la tendance des 5 à devenir obsédés par les problématiques sur lesquels ils butent, préférant construire un savoir démesuré autour de l’obstacle que le contourner. Après avoir écouté le récit de Nanachi, Reg parcourt des yeux les étagères autour de lui et constate que les fioles envahissent totalement la maison. Il saisit enfin à quel point le destin de Nanachi pèse lourd sur ses épaules. En la voyant raconter une histoire à Mitty dans la pièce adjacente, il se dit à lui-même « Elle avait l’air si confiante, et maintenant, elle parait tellement pitoyable… ».

Plus tard, il annonce à Nanachi qu’il accepte de tuer Mitty à l’aide de son incinérateur, à la seule condition qu’elle-même ne se suicide pas après cela. Nanachi hésite un moment, puis détourne le regard et murmure « Tu es cruel ». L’ermite que rien ne semblait atteindre se révèle en fait meurtrie par la vie, au point de vouloir se tuer une fois son dernier devoir accompli. Les personnes en base 5 se sentent en général très vulnérables : c’est justement la raison pour laquelle elles dissimulent leurs sentiments sous une forteresse de rationalité. Lorsqu’on devient proche d’un individu en 5, le contraste entre son détachement habituel et son intensité émotionnelle dans l’intimité peut être saisissant.

Je n’ai pas noté d’aile particulièrement marquée chez Nanachi. Elle est probablement encore trop jeune pour en avoir développé une. (Son âge exact est inconnu, mais elle semble avoir entre 12 et 15 ans.)

Conclusion

A travers son parcours, Nanachi incarne à elle seule les principales thématiques de Made in Abyss : la soif d’aventure, la perte de l’innocence enfantine, la résilience face au deuil, l’acceptation de l’équilibre du monde, dans ses composantes les plus exaltantes comme les plus sombres. Nanachi déclare : « J’incarne la possibilité de revenir du 6e niveau en gardant son humanité »… Je l’interprète personnellement comme un symbole puissant de résilience. Nanachi est descendue là où l’humanité dissimule ses plus noirs secrets et y a vu le pire. Son corps et son âme ont été marqués à jamais par ce qu’elle a subi, mais elle est restée forte. Elle est à la fois le personnage qui annonce les horreurs attendant les héros s’ils continuent leur périple, et le personnage qui les persuade de ne pas abandonner la quête malgré tout. Elle est à la fois la mentor confiante qui aide Riko à guérir et vivre désormais avec sa blessure, et l’enfant perdue qui a désespérément besoin d’une étreinte pour sécher ses larmes. Si elle est indispensable à Reg et Riko, Reg et Riko lui sont tout aussi indispensables… car elle découvre en les aidant combien le monde a besoin de sa richesse intérieure. En laissant partir Mitty, son trésor, tout en reconnaissant son propre droit d’exister au-delà de ses traumatismes, elle tourne une page de son existence : elle peut laisser l’espoir renaître des cendres de sa compagne et s’envoler vers une vie qu’elle a choisie. Et l’âme de Mitty peut maintenant cheminer librement à ses côtés, en lui transmettant sa joie de vivre et ses rêves flamboyants.

Je soupçonne l’auteure d’avoir volontairement brouillé le genre de Nanachi afin qu’un maximum de gens puissent s’y identifier : parce que Nanachi, finalement, c’est peut-être le guide dont nous avons tous besoin pour traverser les épreuves de la vie.

Réflexions sur les fonctions cognitives

Intuition introvertie (Ni), transe et rituels

De nombreuses personnes au sein de la communauté MBTI s’accordent à dire que les INJ ont un regard caractéristique. A la fois évasif et très pénétrant, comme s’ils fixaient intensément quelque chose… dans un autre monde. (En ajoutant des sourcils froncés, on obtient le fameux « death stare » des INTJ.) Pour moi, il s’agit de l’expression que prennent les INJ lorsqu’ils sont occupés à contempler les mouvements abstraits que crée Ni à l’intérieur d’eux. Ils entrent et sortent de cet état second très naturellement, de nombreuses fois par jour, comme s’il leur était plus simple d’appréhender le monde en contemplant son reflet (flou, déformé… mais d’une façon qui a du sens pour l’INJ) qu’en l’observant directement. On saisit l’essence de leur personnalité en étant attentif à la manière dont ils manifestent ces ondulations désincarnées dans la réalité. Aujourd’hui, je vais décrire les aspects qui me semblent les plus primordiaux dans la relation qu’ont les INJ à leur fonction Ni.

Le cycle intuitif de l’INJ

Le cœur du fonctionnement des INJ consiste en la répétition d’un « cycle intuitif », ayant pour aboutissement la création de quelque chose. Une décision, une solution, une œuvre, une prise de conscience… quelque chose qui émerge du point le plus profond de leur monde intérieur, porteur d’une valeur symbolique particulière.  

Les INJ alternent entre des phases d’accalmie, où rien de particulier ne se produit dans leur quotidien, avec des phases exaltées, où ils vivent de grandes révélations sur des questions qu’ils laissaient mijoter dans un coin de leur esprit. La communauté anglophone emploie couramment le terme « insight » pour décrire ce phénomène. Quelle différence avec les classiques « eurêka » qui nous illuminent lorsqu’on trouve enfin la solution à un problème ? Ce phénomène, fruit d’un processus inconscient, arrive chez tous les êtres humains, après tout (puisque tout le monde possède une fonction N). Chez l’INJ, ces révélations s’inscrivent dans un procédé si important qu’il organise son existence autour d’elles. L’ensemble de ses actions et pensées sont reliées par un fil invisible à ce mécanisme central, fonctionnant toujours en arrière-plan de manière autonome. Il mobilise une grande partie de l’énergie du sujet, c’est pourquoi les INJ peinent à demeurer attentifs à leur environnement présent. Quelque chose attire sans cesse leur attention en-dedans… regarder ailleurs est vite fatiguant.

Chaque INJ aura une façon unique de vous décrire la manière dont il vit son cycle. Certains vous diront que, telle une marée montante et descendante, des expériences particulières tantôt viennent les frôler, charriant avec elles des murmures sublimes, tantôt s’en vont dans les profondeurs de leur inconscient couver d’autres joyaux. D’autres diront qu’ils plongent sans fin dans une fractale dans l’espoir d’en effleurer le noyau, et ont parfois la brève illusion d’y parvenir. D’autres décriront une couche infinie de masques sur leur visage, qu’ils ôtent les uns après les autres, sans jamais atteindre enfin le véritable « Moi ». D’autres, à l’instar de votre serviteur, se compareront à des reptiles. Parfois, je me sens à l’étroit dans mon être : j’éprouve un besoin urgent de grande transformation intérieure, comme si ma peau symbolique était devenue trop étroite pour accueillir cette nouvelle version de moi en train d’émerger en-dessous. Mon paradigme de pensée ne convient plus à ma survie dans le monde, je m’y sens étouffée, vulnérable, anxieuse… jusqu’au moment où enfin, l’enveloppe se craquèle puis se détache, laissant place à un nouvel écrin pour mon âme. Un nouveau paradigme s’ouvre à moi, plus complexe et plus beau. Je revis. Je suis forte. Et le cycle recommence. Je nomme ce processus ma « mue spirituelle ».

Ce qu’il faut en tout cas retenir, c’est que l’insight marque une rupture entre un ancien paradigme et un nouveau. Cette évolution par paliers permet de compenser le manque général de spontanéité et de capacité d’action physique chez les types INJ (Se inférieure). Ceci explique comment un INJ paralysé par un problème depuis un long moment peut envoyer valser d’un coup tous ses blocages : des rouages se sont brutalement mis en marche dans sa tête, tout lui paraît désormais évident ! Par effet papillon, un petit élément déclencheur peut engendrer une métamorphose intérieure extrêmement puissante… Peu importe la nature du trésor ramené à la surface lors de l’insight, celui-ci balisera, comme tous ceux qui l’ont précédé et ceux le suivront, la longue route linéaire que l’INJ s’évertue à suivre depuis sa tendre enfance. S’il n’est pas certain de tout à fait cerner ce qui l’attend au bout du voyage, sa boussole intérieure ne cessera jamais de pointer dans cette direction. Rien ne peut arriver de pire à un INJ que de ne pas savoir où il va : s’il perd contact avec Ni, il perd également sa raison de vivre et ses facultés d’adaptation au monde ! Il se sent vide, impuissant, angoissé…

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Le concept des daemons de la trilogie His Dark Materials me paraît proche de ma fonction Ni : un guide intérieur constamment présent, une part de moi et une entité distincte de moi à la fois… dans tous les cas, rien ne serait plus douloureux qu’en être séparée.

L’intuition introvertie détient une sorte d’autorité inflexible. Elle est comme une voix intérieure dont les injonctions incessantes doivent impérativement être suivies, sans quoi l’INJ finira par en souffrir. Les circonstances de la vie font qu’il peut arriver à un INJ d’être déphasé par rapport à ses aspirations profondes (exprimées par Ni), d’oublier le sens de ses choix ou d’être dans le déni de ses rêves. Son intuition le harcèlera jour et nuit jusqu’à ce qu’il retourne sur le droit chemin, tirant sur son âme jusqu’à ce qu’elle abandonne la lutte. Ce travail interne peut complètement épuiser l’INJ alors qu’il ne bouge pas de son salon. Beaucoup d’INJ en ont d’ailleurs conscience sans jamais avoir étudié le MBTI, et l’interprètent à travers d’autres grilles de lecture. Ils voient en Ni un ange gardien, un dieu ou un patron de sorcellerie, qui s’adresse à eux dans une langue abstraite, et les protège tout en leur soumettant des ordres. Les INJ, qu’ils soient croyants ou non, se sentent souvent comme les disciples de quelque chose de plus grand qu’eux.

La chanson « Into the Unknown » de Frozen 2 (« Dans un autre monde » en VF) illustre très bien ce phénomène. Elsa (INFJ), entend une étrange voix l’appeler. Elle sent que cette voix veut la mener loin du château, où elle obtiendra des révélations primordiales sur l’origine de sa magie – c’est-à-dire, le cœur de son identité. La jeune reine tente d’abord d’ignorer cet appel, de résister à tout ce qu’il éveille en elle… Elle craint en effet de mettre en danger ses proches et de perdre ce qu’elle a lutté pour construire, à savoir un cadre stable et heureux. Au fil de la scène, son chant s’aligne progressivement sur celui de la voix, jusqu’à ce qu’elle finisse par totalement l’accepter et la suivre. Elsa déchaîne alors autour d’elle des arabesques magiques, vibrant au son des deux voix réunies. S’il est commun de voir des princesses Disney s’épancher mélodieusement sur un quelconque promontoire, déchirées entre l’envie de partir au loin et la peur de l’inconnu, le cas présent comporte une différence majeure : la voix appelant Elsa n’est pas un sentiment d’ennui ou de confinement nourrissant un désir de liberté (comme chez Ariel, Raiponce ou Vaiana, qui souhaitent explorer le monde extérieur par simple amour de la découverte), mais plutôt le reflet de son inconscient, une part égarée d’Elsa cherchant à refaire corps avec elle. On y retrouve la réticence des INJ à oser s’investir dans un environnement imprévisible et effrayant (Se-inf), dépassée par la force mentale, onirique ou spirituelle de Ni, quand le sujet accueille cette part de lui.

La ritualisation de l’axe Ni-Se

Qu’il connaisse le MBTI ou non, un INJ mature ressent à la fois la nécessité de nourrir son intuition et de laisser respirer sa sensation. D’ailleurs, s’il s’observe avec détachement, il réalisera vite qu’une grande partie de son temps de veille consiste à maintenir un dialogue très précis et subtil entre Ni et Se.

La sensation extravertie détient une place à part entière dans les cycles intuitifs, puisqu’elle y intervient à la fois au commencement et à la fin. Elle apporte d’abord une multitude d’informations du monde extérieur, qui seront analysées et transformées à un niveau très abstrait. Les éléments épars et contradictoires recueillis vont tournoyer les uns autour des autres, se confronter sous tous les angles… puis enfin fusionner et former un tout nouveau concept, où la polarité est rompue et les points de conflit résolus. Ce résultat obtenu, Se donne à l’INJ l’impulsion pour extérioriser le fruit du processus, sous la forme d’un acte ou d’une œuvre. Néanmoins, la sensation reste soumise durant tout le cycle au rythme imposé par l’intuition : Se peut suggérer à Ni de nouvelles expériences enrichissantes, mais elle ne peut en aucun cas interférer avec les paliers les plus profonds du travail. D’où le désintérêt notoire des INJ pour le monde physique, leur tendance à être dans la retenue, et leurs réactions à fleur de peau lorsqu’un élément concret vient rompre brutalement le fil de leurs pensées. (Un bruit les faisant sursauter, un contretemps dont il faut s’occuper, etc.) Pour ainsi dire, l’environnement ne les touche jamais directement : la moindre information en provenance de l’extérieur doit passer par un nombre important de procédés abstraits avant d’être accueillie par l’individu.

De la même façon que les ISJ sont attentifs à leur confort physique et cherchent des repères sécurisants dans leur environnement, les INJ cherchent instinctivement un recoin de leur univers abstrait où activer des patterns qui les inspirent, les apaisent… Le tempo des INJ est lent. Peut-être le plus lent de tous les types MBTI. Ils ont besoin de temps pour intégrer les informations inédites, s’intéresser à l’inconnu, se décider à sortir de chez eux… Mal adaptés à la vie moderne, en particulier urbaine, ils ont constamment l’impression que tout va trop vite autour d’eux, qu’une ondée de détails et de sensations s’abat sur leur tête… Ils ne souhaitent souvent qu’une chose : ralentir, savourer le calme et le silence. Toute tentative d’accélérer ou de saboter le processus de Ni se soldera par une réaction négative de l’INJ. C’est comme si vous lui plantiez violemment un tournevis dans ses engrenages internes pour tenter d’en modifier la marche. Non seulement ils ne tourneront pas plus vite, mais en plus, ils arrêteront complètement de tourner, laissant l’INJ perturbé et endolori. (Le même phénomène s’observe chez les utilisateurs de Si lorsqu’on essaye de les forcer à adhérer à une idée éloignée de leur cadre de pensée.) Une personne ou un environnement provoquant régulièrement ce malaise chez l’INJ perdront sa considération, ainsi que l’honneur de sa présence.

Ainsi, comme leurs cousins sensitifs, les INJ éprouvent généralement un besoin – conscient ou non – de ritualiser leur vie intérieure, afin de mieux contrôler le flux d’information entrant et éviter d’être débordés par le chaos. La solution de l’INJ pour se laisser aller à sa fonction Se malgré le sentiment d’étrangeté qu’elle lui inspire, est d’intégrer dans son cadre de vie organisé quelques « fenêtres » par lesquelles son impulsivité enfouie pourra s’exprimer. Par exemple, il peut s’autoriser un petit plaisir à un moment précis de la semaine ou du mois (un jour associé à son plat préféré, un jour de shopping dans son magasin favori où il a le droit de craquer pour un article…), ou constituer un budget mensuel spécialement dédié à prendre soin de lui. Cette forme d’attention à soi est tolérée dans la mesure où elle constitue une exception confirmant la règle. L’INJ est en mesure de se connecter à ses besoins physiques immédiats car il est rassuré par une impression globale de contrôle et de profondeur abstraite.

En-dehors de ces soupapes « brutes », l’INJ laisse surtout Se exister à travers des expériences inductrices d’états modifiés de conscience (qu’on pourrait appeler selon le contexte « transe », « flow », « focus »…), en combinant attention au présent et exploration de l’imaginaire ou de la spiritualité : la méditation, les promenades en pleine nature, l’auto-hypnose, les arts plastiques, les arts martiaux, certains jeux-vidéos… Cette connexion est plus douce et diffuse, elle permet d’appréhender Se tout en restant blotti dans la zone de confort Ni. Il s’agit aussi d’un moyen très intéressant de fuir la sur-stimulation ambiante en concentrant l’attention sur des sensations plus confortables. Voilà pourquoi de nombreux INJ intègrent ces pratiques à leur mode de vie : ils peuvent entretenir grâce à elles leur équilibre intérieur, sans pour autant trop s’exposer à l’inconnu.

L’INJ conçoit ses actions comme un ensemble linéaire et cohérent, l’amenant d’un point A à un point B – son prochain insight. Lorsqu’il choisit de participer au monde extérieur, il s’engage dans une sorte de rituel, qui doit l’amener à des expériences précises (décidées inconsciemment) permettant la progression interne. Il faut bien retenir que durant une grande partie de sa vie (si ce n’est sa vie entière), l’INJ accède à Se uniquement à travers Ni. Par conséquent, lui seul peut décider de l’emplacement de ses « fenêtres Se ». Les choses matérielles en elles-mêmes sont rarement captivantes à ses yeux : s’il se laisse aller à bouger, toucher, jouer, acheter compulsivement, c’est en premier lieu parce qu’il ressent une connexion intuitive spéciale avec le moment (Ni). Il sent que le fil de son existence est relié à l’objet devant lui ou à l’activité qu’on lui propose : il y perçoit un potentiel de développement important, et lorsqu’il se projette dans l’avenir, il voit cet élément incorporé au décor. Sans cette sensation de lien intime, la fenêtre reste fermée et l’INJ ne voit qu’un spectacle chaotique dénué d’intérêt, si ce n’est terrifiant. Au mieux, il trouve que le divertissement est sympathique, mais ne mérite pas un investissement énergétique de sa part. En introduisant trop d’éléments imprévus, étrangers, l’INJ se sent projeté hors de son sentier intuitif : le rituel est brisé. Les bienfaits qu’aurait pu lui apporter Ni dans cette situation sont neutralisés, l’INJ perd ses repères et doit se réfugier au calme le temps de se réaccorder à sa vision conductrice.

Dans la majorité des cas, l’INJ sait déjà en arrivant quelque part ce qui va l’intéresser ou non. Deux cas de figure sont possibles : le premier est qu’il a étudié la question en amont et vient dans l’objectif de réaliser des actions prédéterminées. Vous aurez alors bien du mal à le détourner de son plan. Par exemple, si vous avez prévu une sortie au musée avec un INJ, il y a peu de chance qu’il accepte de prolonger le moment avec vous dans un bar si ce n’était pas prévu. (Au moins, évoqué en tant que possibilité.) Le phénomène est particulièrement visible chez les INJ en base 5, qui esquissent déjà un mouvement vers la station de métro la plus proche au moment où vous énoncez la proposition. (Un INJ 5 qui tolère les imprévus que vous lui infligez vous apprécie vraiment beaucoup. Et vous déteste, également.) Dans le second cas, l’INJ est présent car son intuition lui a simplement soufflé de venir ici. Il a cerné un potentiel dans une situation et vient inspecter les lieux pour apaiser ses flashs. Un INJ se présentant dans cet état d’esprit sera plus ouvert (d’autant plus qu’il a peut-être lutté un moment contre lui-même avant de se résigner), mais il aura toujours davantage confiance en sa propre intuition qu’en vos suggestions pour comprendre ce qui l’amène ici.

J’espère que cette analyse vous permettra de cerner – enfin ! – l’intuition introvertie, et la façon dont elle se manifeste dans la vie d’un INJ.

Réflexions sur les fonctions cognitives

Sensation extravertie (Se) inférieure et rapport au corps

Chers les atrophiés du S,

Je partage aujourd’hui une analyse sur la fonction Se inférieure (c’est-à-dire telle qu’elle s’exprime chez les types INTJ et INFJ), en particulier dans la thématique du rapport au corps.

Chez les INJ, il y a une alternance entre une non-prise en compte de l’environnement (pouvant prendre des proportions limite absurdes, comme mettre des semaines à réaliser qu’on travaille à côté d’une tour de 40 m de haut avec une mascotte rose fluo sur la façade) et une obsession pour le contrôle de l’environnement. L’INJ ayant une faible capacité à évoluer spontanément dans le monde concret et l’instant présent (Se-inf), et une capacité encore plus faible à cerner le potentiel et les limites de son propre corps (Si), il tente de compenser par un excès de contrôle mental (Ni). Il doit savoir ce qui va arriver, comprendre pourquoi cela risque d’arriver et préparer des parades, afin d’empêcher le chaos tant redouté de survenir.

La fonction Se délaissée vient parfois réclamer son dû à Ni, provoquant frustration et angoisse. Ce sont les « petits trucs » qui forcent l’INJ à prêter attention à son environnement, comme un appareil électrique qui lâche, un livre qui tombe sur son pied, une météo imprévue… Ils sont perçus comme des agressions, voire un « complot des objets » contre lui, qui l’empêche de réaliser son plan alors qu’il voudrait juste naviguer tranquillement dans sa tête. Si vous côtoyez un INTJ, vous l’avez sans doute déjà maintes fois entendu s’exclamer « Que les choses marchent, c’est trop demandé, ça ? ». En réalité, dans l’immense majorité des cas, l’INJ n’aurait pas fait face à ce désagrément s’il avait pris soin d’entretenir mieux son environnement dès le début. Remarquer que son compteur électrique sentait le brûlé depuis des semaines au lieu d’attendre qu’il explose en plein mois de décembre, par exemple… (Toute ressemblance avec des individus existants serait tout à fait fortuite.)

Le corps de l’INJ est typiquement perçu comme un vaisseau de l’âme ou un outil au service de l’esprit. C’est un élément extérieur au « Moi » plutôt qu’une part d’un grand tout formant le « Moi ». Ainsi, chez l’INJ, le rapport au corps est en général similaire au rapport à tout autre élément environnemental : j’entends par là qu’il perçoit le corps comme une entité dangereuse, pouvant se transformer à tout moment et de manière chaotique, indépendamment de la volonté. Un corps peut grandir, grossir, tomber malade, vieillir, se déformer, etc. C’est pourquoi chez l’INJ, la prise de conscience du corps s’accompagne d’un besoin puissant de garder le contrôle sur celui-ci. Ce contrôle peut être actif ou passif, conscient ou inconscient.

Le rapport à Se-inf se résume ainsi comme suit : « J’habite dans une machine complexe. J’aimerais ne pas avoir à y penser, mais si je l’oublie, elle finit par tomber en panne et m’empêcher d’avancer. Je dois donc m’en occuper un minimum, afin d’être tranquille le reste du temps et de pouvoir intervenir sur l’environnement sans limitation quand c’est nécessaire. Parfois, je prends plaisir à interagir avec mon environnement via cet interface physique, mais je constate par la même occasion ses limites et cela me frustre. »

Deux tendances se dessinent : la première est l’abandon de Se devant le constat de son échec (ici, réinitialisation du cycle), par exemple « Je suis trop nul en sport, ça ne sert à rien de continuer ». La seconde est le vautrage dans Se, dans une optique de le développer de force. Par exemple « Je vais faire 180 abdos par jour, et on va voir si c’est trop lui demander à ce corps de tenir 4 entraînements de boxe par semaine, putain ! C’est moi le maître ici, il va obéir à ma volonté ! » (ici, perte de vue de Ni, malaise et épuisement). La seconde option peut passer par de l’automutilation ou de l’auto-privation pour « punir » le corps de ne pas être à la hauteur. Cette sanction consiste souvent à instaurer des règles psychorigides autour de la nourriture, des jeux-vidéo, du sexe ou tout ce qui procure du plaisir « gratuit ».

Des formes de contrôle plus passives peuvent être employées, créant l’illusion d’un rapport sain au corps. Par exemple : un INJ vous donne l’impression qu’il se soucie beaucoup de la diététique, car il ne mange que des plats bien équilibrés ? En réalité, il s’est probablement juste dit « Je ne fais pas attention à ce que je mange de toute façon, alors autant manger sans sel et sans sauce, c’est plus viable sur le long terme ». Il ne prend absolument pas soin de lui, il est au contraire dans une coupure de soi, une privation des sens. Idem pour un INJ sportif, faisant mine d’entretenir sa santé : il y a des chances pour que le sport soit davantage un moyen d’entrer en lutte contre Se (prouver qu’il peut le dompter à sa guise) qu’une démarche bienfaisante spontanée pour le corps. L’INJ lui-même peut vivre dans la croyance qu’il fait attention à son corps, quand bien même ce n’est pas du tout le cas.

Ironiquement, le manque d’attention porté au corps va finir par se manifester par diverses somatisations, que l’INJ ne va pas forcément comprendre (« Pourtant je mange équilibré, je fais de l’exercice : je ne devrais pas aller mal ! »). Son premier réflexe sera de vouloir renforcer le contrôle (encore plus de privation, plus d’actions forcés…) ce qui aggravera le mal-être et l’entraînera dans un cercle vicieux. On est dans la relation typique entre la fonction dominante et la fonction inférieure : les problèmes causés par le manque de la fonction inférieure sont interprétés comme étant un manque d’action de la fonction dominante. Le même mécanisme apparaît chez tous les types… Les Fi-dom vont de plus en plus dans le pathos quand on souligne leur manque d’argumentation logique (si les autres ne réalisent pas que l’émotion est si forte qu’elle se passe de toute argumentation, c’est qu’il n’y a pas assez de Fi), les Te-dom sont de plus en plus dans le contrôle des autres quand on essaye d’échapper à leur autorité (si les autres n’obéissent pas sans saouler avec leurs petits besoins personnels, c’est qu’il n’y a pas assez de Te), etc.

J’observe un rapport tout autre chez les ENP (et dans une moindre mesure les INP). Chez ces types, Si-inf induit plutôt une alternance entre une indifférence au bien-être corporel et une préoccupation forte voire excessive pour celui-ci. Le rapport à Si-inf ressemble plutôt à : « Mon corps est une part de moi, mais je n’ai pas l’impression qu’il soit important de m’en occuper. Parfois je réalise que si, et j’essaye de rattraper tout le manque d’attention que j’ai eu vis-à-vis de mon corps. Je vais identifier ce qui me fait du bien, ajuster mon environnement et améliorer mon alimentation. »

Deux tendances se dessinent : devant le constat d’un corps en piteux état et d’une difficulté à instaurer une autodiscipline de vie, l’ENP opte pour l’abandon de toute tentative de prendre soin de soi, car « De toute façon ça sert à rien, c’est foutu ». Il se laisse engloutir dans des pratiques malsaines, comme des addictions diverses, de l’automutilation, de la surconsommation de malbouffe ou une sexualité dangereuse (ce qui réinitialise le cycle). Ou bien, il opte pour une utilisation excessive de Si, avec une obsession pour la diététique et pratiques liées. Des troubles tels l’hypocondrie, l’anoxerie ou l’orthorexie peuvent alors apparaitre.

Dans les deux cas (Se ou Si-inf), un travail important est nécessaire à l’individu pour rompre la polarité et développer un rapport sain au corps. Je croise rarement des Se/Si-inf qui se ne mentent pas à eux-mêmes sur ce plan de l’existence. Et c’est tout à fait normal, au demeurant, nous avons tous nos faiblesses… Je pense qu’admettre cela est la première étape pour amorcer un changement.