Le type INTJ

Les « faux » INTJ

Un constat revient fréquemment chez mes comparses INTJ et moi-même : une partie non-négligeable des personnes se définissant comme INTJ ne le sont pas. (Idem concernant les ENTJ, soit dit en passant.) Du moins, rien ne laisse penser que leur déclaration soit fondée. Je ne suis pas du genre à courir après les gens que j’estime dans l’erreur au sujet de leur type, notamment si nous sommes séparés par des écrans. En général, je me contente de relever les incohérences observées, puis de laisser mon interlocuteur se débrouiller avec ces éléments. Après tout, s’il étudie sérieusement le MBTI et dispose d’un cerveau fonctionnel, il devrait finir par comprendre sa confusion. J’ai tenté de réunir ici les éléments conduisant à s’identifier à tort au type INTJ (ou à son cousin extraverti, dans une moindre mesure) afin de mieux saisir les mécanismes en jeu dans ce mistype.

Pourquoi on se pense INTJ ?

En premier lieu, si l’on déduit que l’on est INTJ, c’est parce qu’on se reconnaît dans une définition de ce type, qu’on s’identifie à une certaine représentation du profil… Deux points peuvent déjà poser problème.

Primo, la fonction dominante de l’INTJ est l’intuition introvertie. Il s’agit de l’une des fonctions les plus complexes à définir, étant à la fois abstraite et tournée vers l’intérieur. Les ressources en ligne ont tendance à l’expliquer de manière incomplète, voire carrément incorrecte. En outre, lesdites ressources sont généralement rédigées par des gens n’utilisant pas eux-mêmes la fonction Ni. Sans le vouloir, ils la résument donc à ses manifestations visibles depuis l’extérieur, sans capter son mécanisme profond. (Je déconseille aux gens de trop s’appuyer sur mes textes à propos de la fonction Ti pour cette raison, car j’ai conscience d’en avoir une conception limitée.) Ainsi, si j’interroge les intéressés, la plupart s’appuient sur une vision réductrice de l’intuition introvertie. Ils la résument à des clichés et imaginent qu’elle monopolise certains usages, alors que ce n’est pas le cas du tout. Par exemple « la fonction Ni permet de voir loin dans l’avenir », « la fonction Ni rend son utilisateur clairvoyant », « la fonction Ni octroie de la sagesse et un sens spirituel développé »… leur description vague de Ni est souvent en réalité une définition de l’intuition en général (même pas forcément dans son usage chez les types N).

Dans les faits, il peut s’agir de types NP n’ayant pas intégré que tous les NP n’étaient pas des gros bordéliques avec un TDAH, incapables de faire le moindre choix et n’accomplissant rien de leur vie. Ils se disent qu’à partir du moment où l’intuition est assez canalisée pour servir un projet sur le long terme, leur permet d’anticiper des événements et de décoder des messages cachés, elle a forcément une orientation introvertie. En y regardant de plus près, on remarque que le binôme Ni-Se ne se manifeste pas chez eux. Ils ne sont pas concernés par les problèmes typiques des utilisateurs de Se en inférieure, telle que la peur du chaos, le besoin de contrôle excessif, la perception du monde extérieur comme étant imprévisible et dangereux… Ils aiment au contraire explorer, sont excités par l’inconnu, ont une explosion d’énergie face à la nouveauté et se lassent vite ensuite, apprécient passer du coq à l’âne sans se retenir et mettre le bazar dans les conversations (car cela les détend de se lâcher !)… Ils ne rencontrent pas de blocages particuliers là où les INTJ doivent lutter, tout en ressentant de la frustration dans les cadres prévisibles si sécurisant aux yeux d’un Ni-dom. Ils mélangent « prévoir le futur » (Ni) et « imaginer le futur » (Ne), emmêlant prédictions et aspirations au gré de leurs envies…

Il peut s’agir également de types SP ayant bel et bien la fonction Ni dans leur pack, mais confondant l’utilisation dominante avec l’utilisation tertiaire ou inférieure. (Dans le cas présent, ce sont plutôt les ISTP et ISFP qui s’estiment volontiers INTJ.) Ils croient que les fonctions placées en 3e ou 4e place sont inexistantes, ou que l’individu les utilise systémiquement mal. Que nenni. Cela signifie seulement que la fonction n’est pas considérée en priorité. Elle comble les intérêts des fonctions du dessus au lieu d’exister pour elle-même. Par exemple, un ISxP jardinier est capable d’utiliser sa fonction Ni afin de deviner instinctivement la maladie touchant une plante dont il prend soin. Son inconscient va dégager la réponse la plus probable à partir de ses expériences accumulées. A partir de 25-30 ans, un ISxP est souvent devenu bon à ce style de jeu. Or ici, l’intuition est invoquée en complément d’un examen sensoriel (Se), afin de servir un objectif concret. Ce n’est pas l’utilisation de Ni caractéristique des INTJ. Au contraire, les illuminations leur tombent la plupart du temps sur un coin de la figure indépendamment de ce que captent leurs sens. En tout cas, le lien entre la vision et l’information sensorielle n’est pas évident, puisque la fonction Se agit principalement sous le seuil de la conscience. Voir mon article sur l’axe Ni-Se dans les pratiques quotidiennes chez les INxJ.

Secundo, la représentation populaire de l’INTJ me semble assez éloignée de la réalité. Personnellement, en découvrant le MBTI, j’ai commencé par me typer à tort INFJ. Pourquoi ? Parce que je ne m’identifiais pas à un cliché de matheux dénué d’émotions et avide de pouvoir, dont le seul défaut est d’être trop brillant pour le commun des mortels. (Même si c’est vrai, ce n’est pas mon seul défaut, voyons.) C’est ainsi que sont décrits couramment les INTJ sur Internet : comme des êtres insensibles, dominants, inatteignables, entourés d’une aura mythique… en somme, des ENTJ introvertis et sans les difficultés relatives au fait d’être NTJ. Dans la rubrique « faiblesses », on peut lire peu ou prou « les NTJ sont méchants et vous prennent pour des cons », mais nulle mention de nos ressentis ou de nos raisons d’agir d’une manière jugée désobligeante. Point de développement au sujet de notre gestion identitaire particulière, de notre vulnérabilité sensorielle, des dégâts causés par le manque d’attention porté à notre propre bien-être… Nous ne sommes guère qu’un binôme Ni-Te/Te-Ni sur pattes à la sauce blockbusters américains, des monstres écrasant les obstacles en s’exclamant « L’univers est à notre botte ! ». Notre Ni est résumé à de la voyance du dimanche et notre Te à « être capable de suivre un planning », « rendre son dossier à l’heure », « dire parfois des choses sur un ton affirmé » et « faire des blagues sur son projet de domination du monde, LOL ».

Le paradigme sociétal dans lequel nous vivons valorise la fonction Te (il faut être efficace, exploiter les ressources de façon optimale, se bouger, grimper l’échelle sociale, etc.) et la communauté MBTI la fonction N : aussi, l’archétype NTJ représente-t-il pour certains une sorte de Graal. Dans la tête de ceux qui se croient INTJ, il y a souvent une association entre la correspondance à ce type et l’appartenance à une caste supérieure. (Que ce soit au niveau intellectuel, social, spirituel, etc.) Preuve accablante : quand on leur demande comment cela se fait-il qu’ils ne rencontrent pas les difficultés classiques relatives à leur soi-disant binôme Fi/Se inférieur, ils répondent qu’ils ont déjà dépassé ce stade. En effet, leur superbe intuition introvertie (#vieille-âme) a précipité leur mûrissement et résolu toutes leurs tensions internes, en général avant 25 ans. M’est avis qu’il ne faut vraiment pas vivre dans la peau d’un NTJ pour débiter des excuses pareilles…

Les NTJ ne sont pas plus forts, plus matures ou plus adaptés par essence : ils perdraient probablement leurs avantages dans un autre paradigme. Ils sont par exemple peu intégrés dans les milieux militants, ou leurs analyses factuelles et froides sont globalement mal reçues. (Regardez la manière dont Jean-Marc Jancovici, scientifique et militant écologiste ENTJ, se fait rejeter par ses confrères de lutte à cause de ses positions argumentées sur le nucléaire. A titre personnel, je m’intéresse à de nombreux sujets sur un plan idéologique, mais je travaille presque exclusivement seule, car impossible de m’intégrer aux groupes militants – où le F domine de façon écrasante.) Accéder à un équilibre personnel est un travail de longue haleine pour tout le monde, aucun type ne fournit un billet magique vers la félicité. Le fait est que si quelqu’un ne rencontre aucun problème d’INTJ, soit il se ment à lui-même, soit il n’est pas INTJ. Et s’il a réellement résolu ses dilemmes, il est en mesure de raconter son vécu, plutôt que s’appuyer sur des élucubrations floues interchangeables avec n’importe quel type.

Qui se mistype INTJ ?

Le mistype est un phénomène par lequel nous sommes très nombreux à passer. Ce n’est pas grave de se tromper ! On peut avoir mal cerné un point de MBTI ou avoir fait une erreur d’auto-analyse, et mettre du temps à le réaliser. Il est parfois difficile de s’accepter tel que l’on est. Par contre, c’est plus problématique quand on n’a pas envie de comprendre le MBTI mais juste de jouer à faire semblant, qu’on est totalement fermé aux conseils des autres, voire quand on utilise sa persona pour justifier des comportements discutables. Le risque est double pour la personne persistant dans un mistype. D’une part ce n’est pas épanouissant pour elle de s’accrocher à une mauvaise grille de lecture : elle va mal interpréter voire totalement contre-interpréter les situations qu’elle vit. Et pendant qu’elle se félicite d’être un NTJ étonnamment affranchi des problèmes égotiques de NTJ, elle ne remarque pas le travail à faire sur l’ego de son type réel ! D’autre part, en parlant au nom d’un type qui n’est pas le sien, on participe à diffuser des idées reçues à son sujet.

Certains types ont vu leur représentation populaire déformée, à force de ne pas être respectés dans leur définition. Par exemple, les INFP s’identifient massivement au profil INFJ et brandissent leurs problèmes d’INFP comme étant des problèmes d’INFJ. Résultat, aujourd’hui, une majorité de descriptions d’INFJ sur Internet ne rendent pas compte des réelles difficultés des INFJ et s’adressent plutôt aux INFP. Ce qui entretient bien sûr le cercle vicieux, les INFP s’identifiant aux descriptions « d’INFJ ». Difficile de leur en vouloir, quand on constate le foutoir ambiant. Le même genre de phénomène est en train de se produire concernant les types NTJ. Quand mes connaissances NTJ évoquent leur vie quotidienne, ils obtiennent d’ailleurs plus de réactions de « faux NTJ » ne comprenant pas de quoi ils parlent (forcément, ils ne le vivent pas), que de conseils d’authentiques NTJ. Tout fout le camp, mes amis. La décapitation des mécréants n’étant pas ma tasse de thé, je vais plutôt relever les profils participant le plus à ce phénomène et expliquer pourquoi.

– D’autres types NT

Plutôt prévisible. L’INTP et l’INTJ se ressemblent de l’extérieur, en particulier en base 5 (justement la plus commune chez ces deux profils). Sans étude approfondie des fonctions, la confusion est aisée à faire. Même avec ladite étude, en fait, ce n’est pas gagné ! Si l’INTP a reçu une éducation valorisant des traits plus typiquement INTJ (comme l’organisation, l’adaptation aux attentes extérieures au détriment de l’identité, etc.), il peut avoir du mal à distinguer l’inné de l’acquis dans sa personnalité.

L’ENTJ use des mêmes fonctions que l’INTJ : pour peu qu’il soit isolé par contrainte ou simplement misanthrope, il a tôt fait de s’imaginer introverti tout en se reconnaissant – à raison – dans le reste. Les descriptions d’INTJ sur la toile mettent peu en évidence les limites liées à Se-inf et insistent non sans lourdeur sur la maladresse sociale… ce qui sied paradoxalement mieux à l’ENTJ qu’à l’INTJ ! En effet, avec leur axe Te dominante/Fi inférieure, les ENTJ ont grand peine à gérer l’équilibre entre le contrôle du monde extérieur et le respect de leurs propres ressentis. Chez les INTJ, le Te domine Fi mais ne l’écrase pas de manière aussi radicale. Les problèmes occasionnés sont donc présents (tendance à trop travailler, être déconnecté émotionnellement…), mais ne constituent pas sa principale faiblesse.

L’ENTP est moins enclin que les trois autres types NT à effectuer des recherches poussées sur un sujet : s’il s’en tient à des définitions globales (voire mon développement sur la confusion Ni/Ne/N ci-dessus), il peut s’arrêter sur l’archétype INTJ « intello qui aime argumenter et avoir raison » sans prendre la pleine mesure de sa signification. De surcroît, les ENTP se considèrent souvent introvertis, car ils sont plus détachés et autonomes socialement que la plupart des autres types extravertis. Ils peuvent s’éclater tout seuls chez eux un moment grâce à leur imagination débordante, bien que la solitude leur prenne de l’énergie.

– Les INFJ

Certains INFJ très cérébraux (avec des bases ennéagramme de centre mental, notamment) peuvent se croire INTJ, car ils ne correspondent pas aux clichés habituels. Ils fonctionnent généralement avec une fonction Ti très forte, brouillant l’expression du Fe. Ils ne sont pas aussi doux et serviables qu’on l’attendrait d’un FJ, s’intéressent plus aux sciences dures qu’aux sciences humaines ou à l’art… Ils interprètent leur difficulté à ne pas capter leurs propres émotions pour du Fi-ter, alors qu’il s’agit plutôt d’un Fe (par définition, une fonction qui se tourne vers l’extérieur et non vers le sujet). Une exploration plus précise des fonctions cognitives permettra de différencier l’axe Fe-Ti de l’axe Te-Fi chez eux. Toutefois, il paraît souvent extrêmement dur de trancher sur l’identité de ces profils, tant l’auxiliaire et la tertiaire sont diluées l’une dans l’autre. J’en ai vu plusieurs se décrire uniquement comme des « INJ ». Je conseille de s’aider de l’ennéagramme, afin de mieux cerner les motivations derrière les comportements de l’individu.

– Les ISTx

J’ai déjà évoqué le cas de l’ISTP retrouvant sa fonction Ni dans l’INTJ, et partant du principe que « posséder une fonction Ni » = « être Ni-dom ». Vu de l’extérieur, il est vrai qu’entre un ISTP avec une fonction Ni développée et un INTJ avec une fonction Se pas trop dégueulasse, la différence n’est pas évidente. C’est surtout le relâchement des fonctions inférieures qui va trahir le véritable type de l’individu. On pourrait me croire ISTP en m’observant exclusivement à mon entraînement d’arts martiaux, car cette activité mobilise principalement Se. Toutefois, par rapport à un SP, je dois fournir un effort bien supérieur pour le même exercice. Je vais me fatiguer plus vite et cela va se voir. (Je ne vais plus réussir à bouger un membre sans me perdre dans une myriade de questions inutiles sur le sens de mes actes, les bruits ambiants vont me paraître insupportables, je vais me sentir gênée par ma tenue de sport, etc.)

Il en va de même avec un ISTP que vous traînez dans une longue discussion théorique. Il va suivre sans souci au début, puis se sentir las et vouloir passer à autre chose – là où l’INTJ n’en sera qu’à l’échauffement. Même constat avec l’ISTJ qui se croit INTJ, après avoir allègrement confondu « avoir un cerveau » et « être N ». (Là non plus on ne va pas lui en vouloir, puisque c’est ce qu’on sous-entend en permanence dans les communautés MBTI. Il faudrait arrêter ça, d’ailleurs.) Il aura beau dire, son manque d’endurance face aux activités typiquement N, telles que les discussions sur des sujets abstraits, le trahira.

– Les types FP

Cela peut paraître étonnant, mais une part généreuse des « faux INTJ » (et faux NTJ en général) m’ont l’air d’appartenir à la famille FP ! Ici en l’occurrence, de nombreux INFP et ISFP se pensent INTJ (surtout ceux avec un ennéatype mental) et de nombreux ENFP et ESFP sont persuadés d’être ENTJ. Il y a deux raisons à cela. Premièrement, les FP disposent d’une fonction Te, à l’instar des TJ. Arrivés à un certain âge, lorsqu’ils commencent à conscientiser leur pensée extravertie (et leur fonction Ni pour les SFP), ils ont naturellement envie de la mettre en valeur. Comme le fait n’importe qui avec ses fonctions inférieures, en somme. Plus nous sommes mal à l’aise avec une part de nous-mêmes, plus il est gratifiant de constater que l’on progresse avec elle. (Je ne vous raconte pas à quel point les INJ aiment se la péter dès qu’ils savent faire quelque chose avec leur Se, bien qu’ils ne l’assumeront probablement pas devant vous…) A côté de ça, nos fonctions préférées paraissent si évidentes que leur présence est parfois difficile à cerner sans remarques extérieures. Ainsi, les FP sont enclins à se typer à l’envers et à se projeter en NTJ.

Deuxièmement, les FP, de par leur fonctionnement, sont les gens les plus susceptibles de se tromper de type. Ils ne se prennent pas spécifiquement pour des NTJ, mais aussi pour n’importe quel type autre que le leur. Vous me direz : « Comment cela se fait ? Les FP sont pourtant les êtres les plus conscients de leur identité et de leurs goûts ! Ils devraient aisément identifier à quel profil ils appartiennent ! ». En fait, leur don est à double-tranchant. Comme ils mêlent volontiers « Qui je suis », « Qui je pourrais être » et « Qui je voudrais être », ils excellent à se projeter dans des rôles. On trouve d’ailleurs beaucoup de FP dans le domaine du théâtre, de l’art, de l’animation… Or leur projection peut être si intense qu’ils s’y perdent et la confondent avec leur vraie nature. (Par exemple, ils ne différencient pas nécessairement « être apte à s’organiser et à finir son travail quand la situation l’exige » et « être un bourreau du travail qui sur-organise spontanément les choses ». Ils retiendront les fois où leur Te a été correctement utilisé et prendront cela pour un trait central de leur caractère… sans se rendre compte qu’il s’agit juste du minimum syndical pour un vrai TJ.) Si certains FP trouvent leur type en un clin d’œil, d’autres s’égarent complètement. Il devient alors difficile de les ramener à la réalité.

Les FP présentent des difficultés à hiérarchiser les informations. Lorsqu’ils se documentent sur un profil, ils vont plus se focaliser sur les anecdotes qui font échos en eux, que sur la structure globale. Leur identification va également porter sur ces détails, indépendamment de leur compatibilité avec le mécanisme psychologique encadrant le tout (et constituant donc la définition du type). Concrètement, un IxFP est capable de vous annoncer en toute bonne foi « Je suis INTJ parce que je souffle longtemps sur ma soupe avant de la boire, c’est du Se-inf » même si 99 % des caractéristiques de base de l’INTJ ne lui correspondent pas. Là où les TJ s’appuient sur des définitions fixes des objets extérieurs (par exemple : « Une figure à quatre côtés égaux et perpendiculaires est appelée un carré »), les FP s’appuient surtout sur leur ressenti pour décrire les choses. Si un FP perçoit intérieurement ce carré comme un triangle, il affirmera : « C’est un triangle. Oui, on dirait un carré, mais en fait il a vécu des expériences particulières, faisant qu’il ressemble à un carré mais n’est pas un carré. Je le sens. Tu essayes de l’enfermer dans des clichés, mais il peut aussi être un triangle ! ».

Ceci est une métaphore, il y a évidemment des FP brillants en mathématiques. Leur problème n’est pas qu’ils soient dénués de logique, mais qu’ils utilisent leur logique de manière sélective. Ils peuvent être tout à fait rationnels… puis, à un moment, décider s’asseoir sur la réalité objective et de la redéfinir d’après leurs ressentis. (Des « Ok, je ne corresponds pas à la liste de caractéristiques du type X selon la théorie officielle du modèle, mais je suis du type X quand même, car je le sens ! », j’en ai eu des pelletés.) Vous aurez beau démontrer par A+B à votre interlocuteur qu’il n’est pas INTJ, car il ne correspond pas à l’essence même du type, celui-ci n’en aura cure : il se sent INTJ, donc il l’est. Il ne différenciera plus les faits des opinions, agrippera tous les micro-éléments validant son ressenti et ignorera le reste, même si cela implique de friser l’overdose d’absurdité dans votre cerveau de TJ. S’il reste coincé dans ce processus, il peut ne jamais réaliser son erreur. Vous ne pouvez malheureusement pas y faire grand-chose : il ne s’en rend pas compte, n’a aucune mauvaise intention la plupart du temps et suit seulement son instinct. Le temps et l’introspection sont généralement le meilleur moyen de résoudre la question.

Note : Il paraît que la boucle Ni-Fi sert parfois à expliquer son identification à l’INTJ malgré un fonctionnement NF. Attention ! La boucle Ni-Fi est une variante de l’état INTJ déclenchée par un stress intense, une expression de la détresse : on est prisonnier dedans contre son gré, ce n’est pas une forme d’homéostasie. On prend les pires aspects de l’INFJ et de l’INFP pour en faire une chimère dégueulasse. Perso la boucle Ni-Fi, ça ne m’est arrivé durablement qu’une fois, ça devait être en 2017. C’était un cauchemar et je ne veux plus jamais vivre ça. (D’ailleurs j’aimerais pouvoir l’oublier.)

Pour que l’INTJ retrouve son sens

Ce n’est pas parce qu’on est de type T qu’on ne finit pas par s’agacer du non-respect des outils théoriques chers à nos yeux. La parole des NTJ est en train de perdre son impact, à force d’être associée à tout et n’importe quoi. Le MBTI n’est pas sensé être un jeu de rôle, où chacun prend le masque qu’il veut et part se promener avec, sans se soucier de l’impact sur les autres membres de la communauté. Il y a des vraies personnes derrière chaque type, avec de vraies problématiques, usant du MBTI dans le but de résoudre ces dernières et de rencontrer des gens expérimentant des situations similaires.

A quoi bon définir des profils, leur associer des forces et des faiblesses, s’ils sont finalement tous interchangeables ? Pourquoi créer une communauté d’entraide, si la personne s’interrogeant à propos d’un point de développement de son type lit plus de réactions hors-sujets que des réponses constructives ? Comment peut-on se sentir à l’aise, si l’on se retrouve à devoir à expliquer à des « NTJ » qu’il est désagréable de les voir créer 15 sujets par jour pour une question d’une ligne à laquelle ils ont à peine réfléchi, qu’on n’apprécie pas de subir leur forcing émotionnel, qu’on n’a pas envie de digresser du sujet, etc. ? En particulier quand ces « NTJ » n’y voient pas l’ombre d’un souci, nous qualifient de psychorigides trop fermés affectivement, puis retournent exhiber leur persona en ne réalisant même pas qu’ils méprisent le profil qu’ils prétendent avoir ! (A titre personnel, cela me donne vraiment l’impression d’être une bête de foire, une propriété publique épongeant les fantasmes des gens !)

Je revendique donc par le présent texte que l’on rende à César ce qui lui appartient. Il serait temps d’arrêter de s’identifier à l’INTJ pour les mauvaises raisons et malgré des caractéristiques hautement contradictoires avec ce type. Histoire qu’on reparte sur une bonne base, je vais tenter de récapituler ci-après ce qui fait la moelle du type INTJ, à partir des sous-mécanismes composant ce profil.

L’INTJ est un IxxJ

C’est-à-dire qu’il utilise une fonction dominante de perception introvertie. Le défaut principal des types IxxJ est de classer et analyser excessivement les informations déjà connues dans leur esprit, rechignant à aller piocher des données supplémentaires. (Je souligne, car c’est un élément qui n’a pas l’air intégré du tout par une partie des amateurs de MBTI, alors que c’est vraiment la base du Ni/Si-dom.) Les IxxJ sont très dérangés par la sensation de chaos, d’imprévu et d’éparpillement : c’est leur bête noire, leur talon d’Achille. Essayer de nouvelles choses est effrayant pour eux, surtout s’ils ne peuvent pas bien les anticiper ou les contrôler. Ils ont rarement envie de le faire. Et quand ils le font, ça vient d’eux : on ne peut pas les forcer, ils résistent à se faire entraîner. Ils peuvent paraître fermés d’esprit et rejeter en bloc les propositions innovantes (bien qu’ils soient souvent en mesure de revenir dessus un moment après). Si vous prenez plaisir à foutre le bordel sur les réseaux sociaux ou en boîte le soir pour vous détendre, vous n’êtes certainement pas de type IxxJ. Le chaos ne le détend pas, c’est sa principale source de stress ! Cela ne veut pas dire qu’un INTJ n’a jamais envie de se joindre à une situation chaotique, mais cela n’entre pas dans ses schèmas habituels, ce n’est pas l’énergie qu’il dégage au quotidien. Quand un IxxJ est source de chaos, on le relève : « Tiens, il se lâche complètement, c’est atypique de sa part ». En général, l’IxxJ est plutôt celui qui est irrité par l’excès de digressions et essaye de recentrer les échanges, tandis qu’on le traite de rabat-joie. (Notez que le fond de cet article, c’est « Arrêtez de répandre le chaos en faisant tout ce que vous voulez sans respecter les règles, bon sang ».)

L’INTJ est un NJ

Autrement dit, un utilisateur de Ni. Il se projette de façon stable vers l’avenir, le plus loin possible. Si les circonstances l’en empêchent, c’est une souffrance pour lui : il a besoin d’avoir un repère fixe dans le futur et d’organiser son existence autour de lui, de verrouiller son énergie sur ce point de convergence. (A tel point qu’il montre une grande réticence à aller explorer ailleurs une fois qu’il est lancé.) Les INTJ ont tendance à finir ce qu’ils commencent, car leur source de motivation est le tableau final qu’ils ont en tête dès le départ. Leur intérêt n’est pas d’essayer quelque chose, mais d’avoir un produit fini entre les mains. Tout l’inverse des types P, qui sont avant tout intéressés par le fait de vivre de nouvelles expériences ou tester de nouvelles idées. Les P ont un pic d’énergie positive au début de leurs projets, qui va progressivement diminuer et rendre le bouclage difficile. (Bien que la plupart soient capables de se forcer si les contraintes extérieures l’exigent.) Ils se sentiront éteints et auront besoin de virer vers un nouveau projet pour reprendre du poil de la bête. Les INTJ ont au contraire tendance à se focaliser sur un nombre limité de travaux et thématiques, qu’ils vont creuser très en profondeur. Ils ne trouvent pas l’innovation au-dehors, mais en cherchant à toucher l’essence de leur sujet.

L’INTJ est un TJ

– Grâce à leur Te auxiliaire, les INTJ ont des facilités pour mettre des mots sur leurs pensées (au moins par écrit) et sont soucieux d’être compris par les autres (au sens linguistique du terme). Ils vont par exemple annoncer le plan de leur exposé ou définir les mots qu’ils utilisent, afin d’éviter un malentendu sur leur sens. On comprend généralement où un INTJ veut en venir quand il s’exprime. Ils n’ont pas de problème notable avec le fait de simplifier leur propos pour se rendre accessibles, quitte à transmettre un message de manière un peu grossière. (L’efficacité prime chez eux sur la précision, contrairement aux types xxTP.) Ils savent presque toujours se justifier par des arguments logiques : d’ailleurs, ils se justifient souvent sans qu’on ne leur demande rien. De la même façon qu’un FJ a besoin d’extérioriser ses ressentis, un TJ expose naturellement ses processus de pensée, « ça sort tout seul ». Il arrive que le verbe d’un INTJ ne suffise pas à traduire son ressenti ou ses images mentales avec toute la subtilité qu’il voudrait. Cela ne constitue cependant pas une grande gêne, puisque le besoin d’expression identitaire est assez faible. Les autres se plaignent régulièrement de vos propos incompréhensibles, mal formulés ou mal ficelés ? Vous n’avez pas envie de modifier votre manière de parler, considérant que c’est à eux de fournir tous les efforts afin de s’adapter à vous ? Ou bien, vous n’y arrivez pas malgré vos tentatives ? Vous n’aimez pas justifier vos raisons par des arguments (ça vous fatigue, votre ressenti se suffit à lui-même…) ? Il y a très peu de chance que vous soyez INTJ. En revanche, un type IxxP est fort probable, puisque ces derniers se caractérisent par un sentiment fort d’identité empiétant sur leur faculté d’adaptation aux attentes sociales.

– Les INTJ ont des difficultés à se connecter à leurs émotions. Ils ont besoin de temps pour savoir ce qui compte vraiment à leurs yeux. Ceci fait, ils n’y accordent pas d’importance manifeste la plupart du temps, ou les intellectualisent au point d’en paraître détachés. Par exemple, ils n’ont pas de mal à travailler efficacement sur un projet qui ne les captive pas, car les nécessités pragmatiques (gagner de l’argent, garder sa place dans l’entreprise, etc.) sont prises en compte avant leur bien-être. Ils se font violence facilement, souvent au détriment de leur bien-être. Les INTJ à partir de 25-30 ans deviennent plus équilibrés (ils peuvent s’engager dans des causes ou tout plaquer pour suivre leur passion, par exemple), mais priorisent toujours les faits par rapport à leurs sentiments dans la majorité des situations. Vous vous arrêtez rapidement quand vous vous sentez fatigué ? Vous ne faites pas d’excès de zèle ? Vous préférez sans hésitation respecter vos limites qu’accomplir un travail utile mais nuisible à votre bien-être ? L’INTJ n’est sans doute pas une hypothèse pertinente. (Si vous avez tendance à vous surmener car les besoins des autres paraissent plus importants que les vôtres, et que vos décisions reposent davantage sur vos affects que sur la logique, l’INFJ est une bonne possibilité à étudier.)

L’INTJ est un NTJ

La hiérarchisation des idées paraît simple à l’INTJ, car son esprit est conçu pour classifier les informations d’une manière intuitive et efficace. En bref, il sait où il va, d’où il vient, et l’articulation entre les deux se met en place sans effort particulier. Il s’agit d’une des principales forces de ce type : d’une seconde nature, oserai-je dire. Vous ne savez pas par où commencer pour effectuer des recherches ou dresser un plan de dissertation ? Vous captez l’information de façon erratique, papillonnez d’une source à l’autre en récupérant des éléments sans méthode d’organisation préétablie ? Vous redéfinissez régulièrement vos objectifs et virez de bord au fil des trouvailles, ce qui a tendance à vous perdre ? Vous tergiversez 100 ans avant de prendre une décision et ne réalisez pas la plupart de vos idées, faute d’oser vous lancer ? Réfléchissez sérieusement à d’autres hypothèses que l’INTJ. (Et votre méthode de recherche est associée au fonctionnement P.)

Il me semble qu’on tient la base. Certes, le type de personnalité ne définit pas l’entièreté d’une personne. Certes, on trouve des variations d’un individu à l’autre au sein d’un même type. Certes, il est stupide de déterminer le type de quelqu’un en fonction de clichés réducteurs. Néanmoins, il existe des mots pour définir les choses. L’intérêt d’une structure commune, telle qu’une langue ou un modèle de personnalité, est d’utiliser le même vocabulaire pour désigner les mêmes objets. Ainsi, il devient possible de communiquer ensemble, sans perdre 1 000 ans à définir un code d’échange personnel avec chaque nouvel interlocuteur. Merveilleux, n’est-ce pas ? (Moi j’adore le concept.) Le système fonctionne si ses membres jouent le jeu. Se faisant, quand on emprunte un mot en vue d’en faire un usage inapproprié (par exemple, si l’on nomme « soucoupe volante » une table basse), on s’expose au risque d’entendre « Ton jugement vis-à-vis de cet objet est incorrect » ou « Tu devrais relire le catalogue Ikea, la RTGHEKL est une table basse et non une soucoupe volante, mon cher ». Chacun a la possibilité de renommer les tables basses « soucoupes volantes », s’il trouve que leur forme aplatie suffit à en faire des ovni et/ou souhaite vivre dans un univers linguistique parallèle. Il faudra en revanche assumer que les gens ne respectent pas sa nomination, pas plus qu’il ne respecte la leur.

Si ce texte vous a perturbé dans vos certitudes INTJiques, soyez honnêtes avec vous-mêmes. Relisez la documentation sur les fonctions et demandez-vous, en face : « Est-ce que je suis comme ça ? Vraiment ? Concrètement, naturellement, la majorité du temps ? ». Soyez attentifs à l’opinion que votre entourage a de vous : il voit sans doute des aspects de votre personnalité si éloquents que vous-mêmes ne les percevez plus. Si vous ne présentez pas les traits fondamentaux de l’INTJ, ça ne veut pas dire que vous êtes « un INTJ spécial qui passe 99 % de son temps dans une boucle Ni-Fi, à cause d’un traumatisme à l’âge de 7 ans qui lui a fait développer des traits de Ne-dom ascendant Verseau, mais si les astres s’alignaient autrement vous ressembleriez à un INTJ traditionnel, pour sûr (arrêtez de croire que les INTJ fonctionnent forcément comme des INTJ !) » : ça veut juste dire que vous n’êtes pas INTJ. Votre typage est incorrect et il faut chercher ailleurs. Ce n’est pas agréable, je sais (pour l’avoir expérimenté), mais vous allez vous en sortir, ne vous inquiétez pas. Faites ce travail aussi bien pour les NTJ que pour vous. On en ressortira tous plus épanouis.

En vous remerciant de votre attention.

Une reloue d’INTJ

Le type INTJ

L’arrogance de l’INTJ

Les gens qui me connaissent de loin me trouvent souvent arrogante. En bonne Ni-dom, j’ai en effet cette fâcheuse tendance à débarquer au milieu de la bataille avec ma rhétorique aiguisée et mon petit air suffisant : « Bonjour, je sais mieux que vous, je viens vous faire la leçon ! ». Je leur accorde : parfois on dirait que j’étais au téléphone avec Dieu juste avant, et que je viens de raccrocher et d’accourir en les entendant invoquer mes lumières. Non, ce n’est pas ça qui est en train d’arriver ? Tant pis, ma fonction Te est chaude, je leur inflige donc tout de même un superbe traité, avec intro, développement, conclusion. Le spectateur lambda a tôt fait de se sentir irrité, voire de se persuader que mes chevilles sont au bord de l’explosion. De nombreux INTJ vivent ce genre d’expérience. La plupart des descriptions sur Internet décrivent d’ailleurs l’INTJ comme un profil très confiant et un peu hautain. Je vais expliquer l’origine de ce comportement, et aussi en quoi il est généralement mal interprété.

Comme je le disais dans l’article sur l’ennéagramme chez l’INTJ, la plupart des INTJ ressemblent à un mélange des bases 5 et 1 : on fera difficilement mieux placé pour récurer avec acharnement les recoins de Google Scholar. Dans mes études et réflexions, je suis incapable de m’arrêter à la surface : il faut que je gratte jusqu’au noyau, que je le perce, que je le dissèque… Tant que je n’aurai pas débusqué et analysé la plus petite particule existante, j’aurai l’impression de ne pas avoir assez approfondi mon sujet. Par exemple, mon compagnon et moi avons deux cochons d’Inde à la maison. Après avoir pris la décision d’en adopter, j’ai passé des dizaines d’heures à étudier l’animal et la manière d’en prendre soin. J’ai consulté une plâtrée de sites et croisé les sources, arpenté des forums, questionné des passionnés, retourné tout le Youtube francophone du cochon d’Inde (seules mes lacunes linguistiques m’ont empêché de faire de même avec l’anglophone), puis je suis revenue voir mon chéri en lui disant « Je ne sais pas si je suis assez formée pour assurer une belle vie à nos futurs animaux. ». Il a levé un sourcil avant de se moquer gentiment de moi.

C’est ce qui se produit à chaque fois qu’un sujet m’intéresse. Voilà pourquoi je me défends toujours d’être une « spécialiste » du MBTI ou de l’ennéagramme, bien que beaucoup de lecteurs me qualifient ainsi sur l’Antre de la Chouette. Connaître les bases d’une discipline et savoir s’en servir à peu près correctement ne signifie pas être spécialiste : c’est juste le minimum syndical pour que je m’autorise à en parler en public ! Le souci, c’est que la plupart de mes interlocuteurs n’ont pas idée du soin que je mets dans mes recherches. Ils ignorent que ma confiance en mes propres affirmations a été forgée par de longues heures de lectures, d’échanges et d’introspections, sans lesquelles je n’aurais jamais ouvert ma gueule. Au pire, j’aurais bafouillé « Pardon, je n’y connais pas grand-chose, je préfère ne pas m’impliquer à ce sujet », avant d’aller me renseigner pour combler mes lacunes. Ils ne voient que la surface : une personne débitant son discours comme s’il était d’une évidence enfantine (prenant donc plus ou moins les gens pour des cons), en ayant l’air de tenir à mettre un point final au débat d’un vif coup de hachoir linguistique. Ils ne comprennent pas comment je peux basculer si rapidement de la timidité extrême à la grande gueule.

Si les INTJ paraissent remplis de confiance lorsqu’ils s’expriment en public, c’est simplement parce qu’ils gardent leurs idées pour eux dès lors qu’ils les jugent bancales. En réalité, ils se sentent très vulnérables devant les limites de leurs connaissances et capacités. (Ceux qui en doutent n’ont jamais vu un INTJ contraint de jouer au football ou de pratiquer le small talk.) Le concept d’esprit critique leur est également cher : avec leur fonction Fi tertiaire, ils se sentent finalement très faillibles, subjectifs, « humains » en d’autres termes… C’est pourquoi ils tentent sans cesse de démonter leurs propres croyances et arguments, encore plus sévèrement qu’ils le font avec les autres. A l’inverse des INTP, qui ont tendance à partager des idées inabouties en utilisant l’autre comme caisse de résonnance, les INTJ préfèrent réaliser seuls ce « crash-test » et laisser maturer un maximum leurs théories avant d’enfin les partager… Processus peu visible de l’extérieur. Compte-tenu de la facilité à verbaliser dont jouit l’INTJ grâce à Te, on pourrait penser que s’il a quelque chose à dire, il va forcément s’empresser de le faire ! Que nenni. Quand un INTJ émet une affirmation, dans l’immense majorité des cas, il a d’abord passé un long moment à retourner ses hypothèses dans tous les sens, les exploser en morceaux et les reconstruire, jusqu’à s’assurer de leur haute viabilité. D’où cette impression de coup de guillotine au milieu de la table (presque la signature de ce type !) : vous aurez bien du mal à y en redire quoi que ce soit, étant donné que l’INTJ a déjà tout fait subir à son bébé avant d’accoucher. Si vous parvenez toutefois à le coincer, un INTJ mature s’inclinera et intégrera – maintenant ou plus tard, selon l’état de son ego de Ni-dom… – vos réflexions aux siennes.

Pourquoi donc ce perfectionnisme érudit ? A titre personnel, j’ai un souci profond d’atteindre la vérité objective. De toucher « ce qui est », sans fioriture, sans filtre… Même quand la vérité n’est pas celle que j’attendais. Même quand elle me file la gerbe, je veux la regarder dans les yeux et me dire « ça y est, c’est bien elle ». Je me fiche d’être dans votre camp ou non : je suis dans celui de la vérité. (Bien entendu, j’exclus ici ce qui relève des goûts de chacun : il n’y a pas de vérité qui tienne quand il s’agit de son film préféré, il n’y a que des vérités personnelles !) Vous pourrez être un ami cher, si dans un débat l’adversaire tient des propos plus pertinents que les vôtres, je ne vous défendrai pas. Je ne vous enfoncerai pas non plus, à moins que vous ne m’ayez franchement cherchée : je ne vois pas à quoi cela pourrait bien servir, et la méchanceté gratuite est un phénomène qui a toujours échappé à ma compréhension. C’est pourtant ainsi qu’ont été régulièrement interprétées mes tentatives de conseiller les autres ou de leur exprimer mon point de vue : une volonté de détruire par plaisir sadique. Malheureusement, une fois que la personne en face a commencé à m’attribuer des intentions que je n’ai pas, il est difficile de lui faire comprendre ma neutralité.

Les INTJ sont fréquemment aux prises avec ce décalage (tant qu’ils n’ont pas pu créer un cercle social à leur convenance, ce qui prend du temps) : ils sont venus pour avoir une discussion enrichissante, mais au lieu de cela, ils passent finalement leur temps à expliquer qu’ils n’ont jamais insinué ceci, qu’ils n’ont jamais affirmé cela, qu’ils n’ont jamais voulu agresser Untel… Quand bien même, ironiquement, ils s’expriment en général d’une manière très claire et franche, laissant peu de place à l’ambiguïté. S’ils sont jeunes adultes, ils ont même la plupart du temps assez de Fi pour faire un réel effort de diplomatie. Ces expériences s’avèrent frustrantes pour les INTJ : bien qu’ils soient des types assez adaptables en société, capables de travestir leur style de communication pour provoquer moins d’ennuis, ils ont également besoin de laisser respirer leur authenticité pour rester sains d’esprit. Vous rendrez très heureux un INTJ en lui offrant un havre où sa manière de s’exprimer est non seulement acceptée, mais aussi reconnue pour ses qualités.

Le type INTJ

INTJ et ennéagramme

Deux personnes du même type MBTI ont certes un fonctionnement global commun, mais aussi des divergences plus ou moins importantes… Chose logique, puisque le MBTI ne prend pas en compte de nombreux facteurs individuels participant à la construction de la personnalité, tels que l’éducation ou d’éventuels traumatismes. (Et là n’est pas sa vocation.) Le modèle de l’ennéagramme est souvent utilisé pour affiner l’analyse, puisqu’il explore les motivations et failles égotiques de l’individu, là où les MBTI s’intéresse plutôt aux comportements visibles en surface.

Aujourd’hui, je vais présenter la façon dont s’exprime le profil INTJ à travers les neuf bases de l’ennéagramme. Si en théorie toutes les combinaisons sont possibles, leur répartition est très inégale. Certaines s’accordent parfaitement au mécanisme de l’INTJ et ont de fortes chances d’apparaître, tandis que d’autres, du fait de leur caractère contradictoire, sont beaucoup plus rares. L’INTJ classique ressemble à un mélange de 5 et de 1, érudit et perfectionniste. Je développerai donc surtout ces deux profils.

L’INTJ en base 5

L’INTJ 5 est le combo le plus commun. De nature taciturne et solitaire, cet INTJ passe beaucoup de temps à approfondir ses connaissances dans ses sujets de prédilection. Il veut profondément comprendre, accéder aux racines qui unissent les phénomènes du monde autour de lui. Sa fonction Ni est surtout employée pour stocker d’énormes masses d’informations et les analyser en fond, jusqu’à dégager une vision claire et complète de son sujet. (Ce comportement est facilement assimilable à la fonction Ti, c’est pourquoi l’INTJ 5 est souvent confondu avec l’INTP.) Son Se-inf le rend particulièrement détaché du monde matériel au profit de la formation de l’esprit : il se satisfait d’un mode de vie très sommaire, tant qu’il peut lire et méditer de longs moments sans être dérangé. Le style de communication du 5 (appelé « traité ») sied très bien à Ni-Te, qui s’exprime de préférence sous forme de monologues structurés.

L’INTJ 5 résiste naturellement à s’impliquer dans les situations. Avec son Te au taquet, lui faire perdre du temps est un crime à ses yeux : si Ni n’a pas repéré de potentiel dans une activité, il aura beaucoup de mal à accepter d’y participer. Par ailleurs, l’idée de ne pas posséder en lui les ressources pour affronter l’extérieur le terrifie. Considérant qu’il ne possède pas assez de savoir et de maîtrise pour couvrir la situation, il croit que les autres vont trop lui en demander par rapport à ce qu’il peut donner, ce qui le conduira à l’épuisement. Aussi, peu importe l’envergure de ses compétences et accomplissements, il préfère protéger son identité sous un pseudonyme ou s’effacer derrière son travail. Il peut également créer une persona (l’ermite mystérieux, le misanthrope…) afin de justifier cette coupure avec les autres.

La présence d’une aile 6 (celle que l’INTJ a le plus tendance à développer) provoque un paradoxe, puisqu’elle amène un besoin d’appartenance au groupe, d’allégeance à une entité protectrice… L’INTJ 5 avec cette aile se retrouve donc écartelé entre l’envie d’entretenir sa vie sociale et la nécessité vitale de garder son indépendance, ainsi que la croyance bien ancrée que de toute façon, il n’y a pas de vraie place pour lui. On reconnaît l’aile 6 d’un INTJ à sa manière de jouer au loup solitaire au sein même de sa meute, de cracher sur les gens tout en montrant un vif intérêt pour eux, de chercher à s’intégrer puis de fuir subitement… Ce profil est particulièrement sujet à l’anxiété.

L’INTJ 5 aile 4 n’a pas tant de préoccupation pour la communauté et la dimension pratique des problèmes. Il présente une vision plus symbolique, provocatrice, et son rapport au savoir est davantage basé sur Ni-Fi que Ni-Te : la fascination pure atténue le besoin d’application concrète – ce qui renforce le faux-air d’INTP (5 aile 4 est d’ailleurs le profil le plus fréquent chez l’INTP). Éprouvant une certaine fierté à se détacher de la masse, il est plus enclin à s’intéresser à des sujets difficiles d’accès, à chercher des ouvrages rares pour le simple plaisir de les posséder, etc. Là où l’INTJ 5 aile 6 se dit « De quelle manière mon expertise va pouvoir servir à la société ? » (solutionneur), l’INTJ 5 aile 4 se dit « Quelle convention établie par le sens commun il serait utile de briser à l’aide de mon expertise ? » (iconoclaste). Tous les INTJ peuvent adopter ces deux approches, mais leur aile indique pour laquelle ils ont une inclinaison naturelle.

Asada Shino (aka « Sinon ») de Sword Art Online II est une INTJ en base 5 aile 6.

L’INTJ en base 1

Autre combinaison fréquente, l’INTJ 1. Très fidèle à ses principes, cet INTJ a toujours une idée précise de la bonne manière de faire. Sa dominante Ni est employée en priorité pour affiner les réflexions et les techniques jusqu’à trouver la solution parfaite. Il peut rejeter d’emblée les idées alternatives, car il croit fermement que les siennes sont meilleures. Souvent, il s’agit moins d’orgueil que d’un désir très fort de trouver la réponse la plus adaptée doublé d’une foi inébranlable en son intuition. Il est plus sensible que la plupart des autres INTJ au sens de la morale, ce qui peut être déterminant lorsqu’il sélectionne quelles informations garder ou rejeter.

Contrairement à son cousin en base 5, l’INTJ 1 n’hésite pas à faire la démonstration publique de son expertise dès que nécessaire. On lui a souvent reproché d’être un « monsieur je-sais-tout » à cause de sa manie de corriger ou diriger les autres. Ses hautes exigences personnelles sont prises pour acquis et projetées autour de lui, ce qui occasionne beaucoup de frustration. Son pilote Ni-Te combiné au filtre Fi trouve des solutions pour rendre le monde idéal, mais nourrit aussi la conscience aigüe qu’elles seront impossibles à mettre en œuvre à cause de l’incompétence et l’oisiveté notoire du genre humain. Cette idée rend l’INTJ 1 fou de rage en son for intérieur et peut le faire sombrer dans une profonde déprime. La position tertiaire de Fi ne l’aidant pas à traiter sainement ces états, il peut devenir très soupe au lait lorsqu’il est exposé au chaos.

L’INTJ 1 semble moins apathique et « flottant » que l’INTJ 5. Il est plus enclin à faire du bricolage chez lui, à organiser des événements, à participer à des débats un peu houleux, etc. Sa fermeté de caractère et son sens de l’honneur s’expriment souvent à travers un côté justicier. Lorsqu’il développe une aile 2 (avocat), il dispose d’une connexion aux autres qui adoucit son attitude, et le bien de la communauté prend une vraie place dans sa réflexion. Il peut cependant tomber dans un rôle de chevalier blanc et devenir dépendant de son image publique. Avec une aile 9 (idéaliste), l’INTJ 1 se montre moins expressif, plus détaché. Il nourrit un idéal impersonnel et se sent dépassé par cette vision, comme si une entité supérieure l’avait investi d’une mission. Selon le niveau de maturité, dans ce sentiment de transcendance, il opère avec humilité et désintéressement, ou bien se comporte en unique détenteur de la grande Vérité.

L’INTJ 1 peut être difficile à différencier d’un ISTJ, car sa base s’exprime en particulier à travers leur axe Te-Fi commun. (En outre, l’ennéatype 1 est l’un des plus fréquents chez les ISTJ.) La principale distinction est que la compulsion de l’INTJ se manifeste en premier lieu au niveau abstrait : en gros, il fait la police des idées avant la police des pratiques.

Gandalf du Seigneur des Anneaux est un exemple d’INTJ 1 idéalisé.

L’INTJ en base 6

L’INTJ 6 présente des traits contradictoires en apparence, puisque l’INTJ est l’un des types les plus indépendants d’esprit alors que le 6 a besoin, par essence, de s’appuyer sur une entité extérieure. Pourtant, si l’INTJ 6 n’est pas le profil le plus commun, on est loin du mouton à cinq pattes.

Cet INTJ utilise son Ni en priorité pour prédire les potentiels dangers. Avec sa capacité à se projeter très loin dans le futur, autant dire qu’il se promène souvent au sommet de l’échelle de Cassandre. L’INTJ étant rarement un individu débordant de sociabilité, ceux en 6 choisissent en général pour référence une haute autorité intellectuelle (un savant, un penseur, etc.) ou un ensemble de théories (scientisme, philosophie, etc.). Adhérer à une idée n’empêche pas d’en développer son approche personnelle : l’INTJ 6 va ainsi pouvoir jouir de la protection de cette autorité externe tout en gardant une marge d’indépendance. Ce sera par exemple un INTJ qui rédige des travaux en citant abondamment des figures qu’il admire, ou en refusant de s’écarter de la méthode prescrite par son mentor spirituel. En mode contrephobique, il peut se montrer agressif envers toute forme d’autorité intellectuelle, voire tremper dans le complotisme.

Plus que tous les autres, l’INTJ 6 fait preuve d’une loyauté sans faille dès lors qu’il a prêté allégeance. Il dépense énormément d’énergie pour tenir ses promesses et satisfaire ceux qu’il aime. Le perfectionnisme typiquement INTJ est ici dirigé vers le besoin de garder sa place au sein de la communauté chérie. L’INTJ 6 a tendance à penser que la moindre petite erreur va le condamner, amener son rejet radical et définitif du groupe, et ceci l’angoisse terriblement… Le défi pour lui sera donc de prendre confiance en ses capacités et en la bienveillance du groupe. (L’INTJ 5 aile 6 aura beaucoup en commun avec lui sur cet aspect, bien que la motivation soit différente.)

Twilight Sparkle de My Little Pony est une INTJ en base 6 (à dominante phobique).

L’INTJ en base 3

L’INTJ 3 s’éloigne assez de l’archétype INTJ basique. Sa dominante Ni est surtout utilisée pour calculer de quelle façon il pourrait réussir sa vie et s’élever en société. Très bon caméléon, il a tendance à mettre en avant ses exploits et à entretenir soigneusement son image publique (là où les autres INTJ font juste le minimum syndical pour être laissés tranquilles) : une aisance en société qui pourrait le faire passer pour un extraverti. De plus, l’expression de sa fonction Te est plus feutrée que chez la plupart des autres INTJ, évoquant parfois presque du Fe. Contrairement à l’INTJ classique, l’INTJ 3 il n’a en général pas de difficultés à se lier à d’autres individus et à les inclure harmonieusement dans ses plans. Les flemmards et autres gêneurs ne sont pas plus estimés qu’à l’accoutumée, mais il a le compliment plus facile pour les collaborateurs compétents, voyant davantage l’intérêt d’encourager les troupes.

L’INTJ 3 rejoint les autres variantes de l’INTJ dans sa grosse capacité de travail, ce qui arrange bien son caractère ambitieux. Il peut se montrer très compétitif et stratège, mais contrairement au 8, sa conscience sociale élevée lui évitera de provoquer inutilement du grabuge. A un stade d’intégration sain, il utilisera l’énergie du 3 pour déployer ses capacités réelles, au lieu de se contenter d’un affichage gratifiant mais superficiel. Les principaux points faibles de cet INTJ seront un excès d’effort au travail nuisant à sa santé, ainsi qu’une trop forte confiance en lui. L’angle mort Se risque de lui mettre des bâtons dans les roues alors qu’il se croyait intouchable.

Lord Baelish de Game of Thrones est un exemple d’INTJ 3.

L’INTJ en base 8

Vu de l’extérieur, la différence entre cet INTJ et un ENTJ peut être impossible à faire. L’INTJ 8 s’appuie sur une fonction Te particulièrement solide : il a un leadership naturel, une force de travail impressionnante (même pour un IxTJ) et souvent beaucoup plus de présence qu’un INTJ de profil plus classique. Et pourtant, en authentique introverti, il est bel et bien fatigué par les interactions sociales et a besoin de temps seul pour récupérer. Il dispose aussi d’une conscience émotionnelle plus élevée qu’un ENTJ, bien que sa compulsion d’évitement de la faiblesse puisse l’amener à mépriser cette part de lui. De tous les INTJ, il est sans doute le plus sujet au risque d’épuisement par manque d’écoute de soi.

La fixation du 8 (puissance, courage) s’exprime surtout sur le plan intellectuel : ambitieux, l’INTJ 8 aime utiliser ses compétences pour prendre la tête de grands projets. Il est excessif dans ses réactions et provoque des conflits, par manque de contrôle ou par plaisir de provoquer des joutes intellectuelles, même quand cela n’est pas forcément constructif. Il sait reconnaître et respecter ceux qui atteignent sa barre, mais ne montre pas de sensiblerie pour les autres. Perçus comme des obstacles à l’accomplissement de sa vision, ils sont écartés automatiquement de son chemin. Les INTJ 8 matures peuvent cependant chercher à s’entourer de quelques présences plus douces, afin de développer leur sphère socio-affective à leur rythme.

Yennefer de The Witcher peut être identifiée comme une INTJ en base 8

L’INTJ en base 9

Nous arrivons dans la zone des spécimens collectors (déjà que vous ne croiserez pas des INTJ 3 ou 8 à chaque coin de rue…). A partir d’ici, je suis plus dans l’hypothèse que la description, ayant vu trop peu d’INTJ dans ces bases pour dégager une vision claire de ces combinaisons. Il est rare de croiser un INTJ 9. D’ailleurs, les personnes se déclarant INTJ 9 sont généralement INTP, ISTP, INFP ou INFJ en réalité. Ou des INTJ 5 qui ont mal appris leur leçon. Le 5 et le 9 se ressemblent en effet à bien des égards, puisqu’ils partagent la blessure de rejet. Dans les deux cas, nous avons un individu qui ne reconnaît pas ses propres besoins – voire sa propre existence – comme légitimes. Il croit qu’il dérange les autres par sa présence, qu’il est « de trop » sur cette planète. 

Toutefois à la différence du 5, qui part en quête de compétence et d’autonomie, le 9 pratique la narcotisation : puisque ses besoins ne sont pas légitimes, autant faire comme s’ils n’existaient pas. Là où l’INTJ 5 utilise Ni pour réaliser un intense travail d’introspection et développer divers compétences de survie, l’INTJ 9 va plutôt se servir de Ni pour créer un univers alternatif confortable où se réfugier. Il peut se plonger dans ses activités favorites, comme la lecture, l’étude de la Science ou la spiritualité, afin de ne pas affronter ses difficultés du quotidien. La fonction Te est fortement influencée par Fi lorsque l’INTJ partage son monde aux autres, lui donnant souvent un faux-air de Fe. Cet INTJ peut être particulièrement embêté dans ses relations sociales, puisqu’il doit gérer la contradiction entre sa compulsion de 9 (éviter les conflits, ne pas rompre la sensation de fusion avec l’autre…) et le besoin d’efficacité de Te, qui donne aux INTJ leur habituelle franchise.

L’INTJ en base 4

Combinaison rare et difficile à cerner. L’INTJ est un type particulièrement attaché à la notion de Vérité : et si la Vérité existe, pour lui, elle est objective. Il développe généralement un esprit critique très aiguisé, afin de canaliser son intuition et s’affranchir au maximum de ses biais cognitifs – qu’il est tout à fait conscient d’avoir. L’ennéatype 4 appréhende le monde à travers le prisme de ses émotions et tend à les considérer comme plus vraies que la réalité tangible elle-même. Comprenez mon lever de sourcil quand quelqu’un affirme incarner la combinaison des deux : dans la majorité des cas, il s’est trompé sur au moins l’un des deux typages.

A première vue, l’INTJ 4 semble assez similaire au 5 : réservé, mystérieux, il passe le plus clair de son temps seul à explorer son monde intérieur très dense et complexe. Il s’appuie particulièrement sur son binôme Ni-Fi et entretient des états d’âmes houleux. Bien qu’il se sente torturé par ces tourbillons émotionnels et ces visions étranges, il en a également besoin pour propulser ses réflexions. Chez cet INTJ, la compulsion d’évitement de la banalité est souvent déplacée sur le champ intellectuel : envieux de ceux qui maîtrisent mieux les choses que lui, il réalise moult efforts pour améliorer ses compétences, mais peine à se sentir satisfait du résultat. Quand il s’agit de ses relations amoureuses, son perfectionnisme n’a plus de limites : il peut attendre l’âme sœur pendant de très longues années, tout en élaborant minutieusement ses plans afin que les choses se déroulent selon son idéal. Comme l’INTJ 8 ou 6 contrephobique, il est en général provocateur, peut s’habiller de manière voyante ou être cassant avec les autres pour marquer son appartenance à une « caste » fantasmée.

L’INTJ en base 7

Combinaison très contradictoire : si elle existe, elle est particulièrement rare. La base 7 induit une recherche compulsive de plaisir, que l’individu va assurer grâce à un tempérament ouvert. Il est attentif aux opportunités et se tient prêt à virer de bord dès qu’une occasion plus favorable se présente. Il est excité par la nouveauté et fuit instinctivement les situations désagréables. Par conséquent, il lui est difficile de rester constant dans ses envies et ses projets. Les individus en base 7 sont majoritairement des ExxP (c’est-à-dire des hauts utilisateurs de Se ou Ne). Le binôme Ni-Te induit au contraire un besoin fort de structure intérieure et la poursuite d’une vision abstraite extrêmement stable dans le temps. Les INTJ détestent qu’on les empêche de poursuivre leurs objectifs : il est épuisant pour eux d’être exposés à des imprévus ou à des digressions jugées inutiles. En outre, ils craignent rarement de faire face aux réalités désagréables (je dirais même plus : ils vont les chercher !) et ont tendance à sacrifier leur bien-être dans la poursuite de leurs entreprises. Il faut plusieurs décennies de travail à un INTJ pour apprendre à se reposer, apprécier un peu de bazar et d’oisiveté dans le fil de son existence… Bref, l’INTJ incarne à peu près l’inverse des caractéristiques du 7.

Les INTJ se prétendant d’ennéatype 7 sont généralement des INTJ 5 ou 1 intégrés ou désintégrés durablement dans cette base. Ou alors, ils sont bien en base 7, mais absolument pas INTJ. Si les INTJ en base 7 existent, ils ne ressemblent donc pas à l’archétype habituel du 7. Je n’en ai personnellement jamais croisé. Théoriquement, leur Ni-Te travaillerait en étroite collaboration avec Se pour assurer l’avenir le plus agréable possible. Il s’agirait sans doute d’un genre de « compulsion reportée », insistant à fond sur l’aspect planificateur du 7.

L’INTJ en base 2

Combinaison si hautement improbable que je doute même de son existence. Il faut avoir trempé le bébé dans des substances avant de le sécher à la centrifugeuse pour obtenir un résultat aussi dénué de cohérence. Et ce ne serait pas la fin de son calvaire, parce que si un jour je croise un INTJ 2, je le séquestre dans mon sous-sol au nom de la Science. Ai-je vraiment besoin d’expliquer pourquoi le concept d’INTJ d’ennéatype 2 atteint le paroxysme de la contradiction ?

L’ennéatype 2 se caractérise par la quête du statut de « sauveur », ou plus largement de personne aimante qui fait plaisir aux autres. La compulsion de cette base incite l’individu à donner de sa personne sans compter, quitte à travestir son identité ou séduire son interlocuteur pour qu’il se laisse chouchouter. Le 2 peut dépenser énormément d’énergie à satisfaire les autres en donnant l’impression d’être désintéressé, alors qu’il attend en réalité impatiemment des louanges. Par orgueil, il éprouve de grandes difficultés à reconnaître ses propres besoins. Il a généralement du mal à définir sa propre identité, à différencier ce qu’il aime réellement et ce qu’il fait pour répondre aux attentes de son entourage… L’INTJ est l’un des types les plus indépendants et individualistes du MBTI. Si certains INTJ apprécient beaucoup aider les autres, se sentir utiles, voire développent un petit côté « syndrome de l’infirmière », il est ahurissant d’imaginer un INTJ dans le complet renoncement de soi, ne pas poursuivre de vision, ignorer notoirement son besoin de solitude et de méditation… l’excès inverse le guette beaucoup plus ! Les INTJ très soucieux de leur image sociale et tournés vers les autres sont généralement des 1 aile 2, des 6 ou des 3.